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— Je suis votre ami et votre admirateur, et je veux vous servir de mon mieux, auprès du grand public, dès mon retour en France.

Des Frères, je m’en vais chez les Filles de la Charité. Un orphelinat, des écoles, des ouvroirs de lingerie et de couturer, environ sept cent trente élèves, et puis un hospice d’enfants trouvés qui abrite trente petits malheureux, un hôpital de vingt lits, un dispensaire qui soigne trente mille malades à l’année.

En traversant les dortoirs, où l’air circule abondamment et fait tout voltiger, je remarque :

— C’est bien aéré, mais tout de même un peu serré.

— Aussi faisons-nous construire, répond la Supérieure.

— À quoi bon ? dit plaisamment le consul, M. Hepp, avec qui j’ai le plaisir de faire cette visite. Ce sera tout de suite aussi plein.

La Supérieure m’explique qu’on leur demande de tous côtés de nouveaux orphelinats, de nouvelles écoles. Dans la montagne, elles ont des classes fréquentées gratuitement par cinq cents élèves.

Cette Supérieure est d’Avallon, dans l’Yonne. C’est dès 1863 qu’elle est venue en Egypte d’abord et puis à Tripoli, et au cours de ce demi-siècle, elle n’est retournée que trois fois en France. Ses premières élèves maintenant sont grand mères. Jeunes ou vieilles, toutes les Tripolitaines qui ont passé par l’école y reviennent souvent voir les Sœurs.

— Ici tout le monde nous aime, les Musulmans les premiers. Cette vieille religieuse bourguignonne est vraiment une grande dame de chez nous. En sortant de son école, je vais remercier le gouverneur de Tripoli, le Mutessarif, Raouf-ben-Ayouli, qui a envoyé un détachement de soldats pour me rendre les honneurs. Il me dit, à mon grand effroi, qu’on se prépare à me recevoir grandiosement à Qalaat-el-Hoesn, et qu’on est venu faire des achats à Tripoli. Cela me confirme ce que je savais par ailleurs, et me donne un vif désir de rentrer à Beyrouth, car ces fêtes et festins vont gâter ces solitudes, et je suis à bout de fatigue.

Je n’avais pas quitté l’aimable gouverneur depuis deux heures qu’il venait à mon hôtel me rendre ma visite. Il était accompagné du président de la Commission municipale, qu’il veut bien me laisser pour me guider à travers la ville.

Nous allons d’abord au château. En cours de route, cet