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tout mon programme des châteaux, il me restait à voir Qalaat el Hoesn. Le voyage le plus simple, et l’on m’y attendait. Mais les divertissements que venait de m’annoncer le Mutessarif ne pouvaient rien ajouter à mon enquête des Assassins. Ces fêtes, que je regrette maintenant, m’intimidèrent. J’avais hâte d’un peu de repos et de solitude, pour classer mes impressions et me refaire de nouvelles curiosités. Cette espèce de fantasia que l’on me promettait acheva de donner, dans mon imagination, un caractère un peu banal à des ruines auxquelles je reprochais déjà d’avoir reçu trop de visites. Très fier d’avoir vu des sites mystérieux, je savais mauvais gré à Qalaat el Hoesn d’avoir été décrit par Lockroy et Gérard de Nerval. Sur un seul point, ma curiosité était en éveil. J’aurais voulu y lire de mes yeux une inscription que je sais qui s’y trouve, griffonnée par un chevalier, au douzième siècle, sur les murs du vestibule de la chapelle, et dont je ne doute pas que Gérard de Nerval ne l’ait heureusement méditée.


Ultima sit prima
Sit prima secunda
SU una in medio posita
Nomen habebit ita.


À M. Aristide Marie de vérifier si ce n’est pas en déchiffrant sur place ce logogriphe que le charmant fol conçut le sonnet d’Artemis, le poème insensé que nous aimons :


La Treizième revient… C’est encor la première,
Et c’est toujours la seule, — ou c’est le seul moment :
Car es-tu reine, ô toi ! la première ou dernière ?
Es-tu roi, toi le seul ou le dernier amant ?…

Aimez qui vous aima du berceau dans la bière ;
Celle que j’aimai seul m’aime encor tendrement :
C’est la mort — ou la morte,… ô délice ! ô tourment !
La rose qu’elle tient, c’est la rose trémière.
……………….


Vers charmants et pleins d’ombre ! Bijou enlevé à la dea syria, à la déesse multiforme, qu’après Gérard je suis allé honorer. Ceux qui viendront après moi se défendront mieux sans doute contre cette contagion de poésie. La mystique procession n’est-elle pas interrompue ? Le général Gouraud a créé