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LA PÉDAGOGIE FRANÇAISE.

rions Nicole recommander l’usage des cartes géographiques, des tableaux d’histoire, de tout ce qui parle aux yeux ; Fénelon, conseiller pour l’histoire sainte la forme de l’entretien et du récit. « Animez vos récits, dit-il, de tons vifs et familiers ; faites parler tous vos personnages : les enfants qui ont l’imagination vive, croiront les voir et les entendre. Par exemple, racontez l’histoire de Joseph : faites parler ses frères comme des brutaux, Jacob comme un père tendre et affligé ; que Joseph parle lui-même, qu’il prenne plaisir, étant maître en Égypte, à se cacher à ses frères, à leur faire peur, et puis à se découvrir. Cette représentation naïve, jointe au merveilleux de cette histoire, charmera un enfant… »

Oui, charmer l’enfant, lui rendre la science aimable, voilà à quoi tendent tous ces maîtres sans distinction, jansénistes, jésuites, oratoriens, Pascal comme Fénelon, Rollin comme Rousseau : M. Gréard a remarqué avec raison que nous avions eu avant Frœbel la riante idée des Jardins d’enfants. Prenons garde que l’absolue recherche de cet idéal pourrait bien aller contre le but même de l’éducation : supprimer la peine et la difficulté du travail pour l’enfant, serait une médiocre préparation aux difficultés et aux peines de l’existence. Mais tranquillisons-nous, on ne les supprimera jamais assez pour que l’école cesse d’être l’apprentissage de la vie. Et si l’on se reporte aux traditions de la scolastique, on s’explique cette réaction unanime, plus qu’utile, nécessaire contre la discipline et la méthode du moyen âge, qui semblait avoir pris à tâche d’entourer l’étude de l’appareil le plus sombre, le plus répugnant, le plus propre à comprimer la naturelle expansion de l’âme et du corps : quand Montaigne appelle l’école de son temps une geôle et l’écolier un esclave, il n’exagére pas ; or, l’enfant qui est