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LA PÉDAGOGIE FRANÇAISE.

tout le monde. L’instruction primaire devait donc bénéficier, elle aussi, de ce long travail qui n’avait pas été fait pour elle, et quand sonna l’heure de 89, on avait en France la conception moderne, je dirais presque philosophique de l’école primaire. Cette conception, la Constituante a eu la gloire de la formuler pour la première fois, dans le projet de loi préparé par M. de Talleyrand : « L’objet des écoles primaires est d’enseigner à tous les enfants leurs premiers et indispensables devoirs ; de les pénétrer des principes qui doivent diriger leurs actions ; et d’en faire, en les préservant des dangers de l’ignorance, des hommes plus heureux et des citoyens plus utiles. » On a fait honneur aux législations scolaires des peuples étrangers et surtout des peuples de race germanique, depuis 45 ou 20 ans, d’une tendance, qui leur serait propre, à rehausser l’importance de l’instruction primaire par les définitions qu’elles en ont données et qui ont la valeur de déclaration de principes. Aucune, que je sache, n’est supérieure à celle qu’on vient de lire et qui leur est extérieure de tant d’années ; aucune n’exprime sous une forme à la fois plus simple, plus claire et plus complète, l’objet de l’enseignement primaire : l’esprit français s’y reconnaît, et y reconnaît en même temps la pensée vraie de la Révolution française, en matière d’éducation.

En précisant l’apport de la France dans l’œuvre de la pédagogie moderne, je n’entends ni méconnaître celui des pays étrangers ni en diminuer la valeur. C’est un fonds commun enrichi chaque jour par le labeur de tous, et auquel tous peuvent emprunter sans crainte de l’épuiser : la vérité est comme la charité, elle peut se prodiguer sans s’appauvrir.

Paul Rousselot,
Inspecteur d’Académie.