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ENSEIGNEMENT MANUEL.

bons jours et les conclusions du réformateur furent assez généralement acceptées, grâce au talent de l’écrivain. Il y a loin, malheureusement, de l’adoption d’une idée à son application.

À première vue, du reste, on aperçoit ici que l’avis s’adresse avant tout et même exclusivement à la classe qui a peut-être le moins besoin d’en profiter ; Émile est le fils d’un grand seigneur, ou, supposé le pire, de quelque fermier général. Qu’il y ait à tirer de la première partie du conseil une pratique immédiatement salutaire, nul n’en saurait douter, mais les intéressés pourraient en juger autrement de la seconde ; l’acquisition d’un métier sera pour eux une précaution par surcroît, sage tout uniment ; or la sagesse n’est pas le fond le plus courant et les riches n’en sont certes pas plus favorisés que les autres. Combien, en effet, plus de cent ans après Rousseau, compterons-nous de gens à fortune qui, par prévision, veuillent que leurs fils, ingénieurs, avocats ou banquiers, soient en outre de bons menuisiers ? La supposition fait sourire : on est riche, donc on le sera toujours et quant au développement musculaire, les plus exigeants des pères trouvent que les exercices élégants ne manquent pas.

Cela se conçoit et s’explique suffisamment par les habitudes du milieu, par la tyrannie des convenances et cependant le choix fait par Rousseau d’un enfant des classes favorisées était indiqué pour l’heure où il écrivait.

Il y avait certainement, dès ce temps-là, un mouvement compliqué de théories et de discussions critiques qui menaçait le vieil état de choses, et nul, plus que lui, n’y a poussé. Mais cette effervescence, purement politique, n’empruntait rien en réalité aux couches profondes : le bouillonnement n’était que superficiel. Ce qui demandait surtout à