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REVUE PÉDAGOGIQUE

pour la pédagogie ; comme pour l’agriculture, la métallurgie et les différents arts.

Dès le début, on dut apercevoir, avec plus ou moins de netteté, le double objet de l’éducation, qui est de former l’homme pour lui-même, et pour les autres. Si l’enfant était destiné, comme les petits du lion par exemple, à recevoir dans une famille isolée les soins qui lui sont nécessaires jusqu’à ce que son corps soit assez développé et son instinct alimentaire assez instruit par les leçons de ses parents, pour qu’il puisse lui-même poursuivre sa proie, et à vivre ensuite dans la solitude, l’éducation de l’individu existerait seule. Elle serait à pou près la même pour chacun ; les inspirations de l’instinct y suffiraient dans chaque famille ; elle ne recevrait aucun perfectionnement par la suite des siècles ; elle serait enfin extrêmement bornée. Mais un penchant irrésistible entraîne l’homme vers ses semblables. S’il se mêle à ceux avec le seul souci de son individu et l’ignorance des rapports qu’il doit avoir, des ménagements qu’il doit garder avec les individualités voisines, il se heurte immédiatement contre leur résistance, et comme elles sont plus nombreuses, par conséquent plus fortes, il sort brisé de la lutte, Il faut donc qu’il reçoive, même avant de le devenir, l’éducation du citoyen. Élever l’individu, c’est donner à l’enfant les moyens de vivre seul ; élever le citoyen, c’est lui donner les moyens de vivre avec les autres.

La vie sociale n’entraîne pas seulement des devoirs. Elle est une source inépuisable d’avantages pour ceux qui la pratiquent. Elle éveille et précise en eux des idées de justice, de vertu, de religion, de science, d’art, qui autrement n’auraient fait dans leur esprit que des apparitions confuses, Ainsi se forme et s’agrandit peu à peu le patrimoine