Aller au contenu

Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1887.djvu/351

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
341
PROTECTION DE L’ENFANCE

Dans ces groupes, chaque enfant a son compte individuel ; à son débit figurent ses dépenses d’entretien, de nourriture ; à son actif, ses salaires. L’administration ne garde à sa charge que les dépenses d’instruction et de maladie ; mai l’enfant, auquel l’industriel se trouve avoir fait quelques avances pendant la période où ses dépenses sont supérieures à ses salaires, ne tarde pas à tout rembourser lui-même. Généralement, après une période de trois ans, les comptes individuels sont en équilibre ; dès lors, chaque trimestre, l’actif net de chaque apprenti est mis à la caisse d’épargne. Le dernier rapport de M. Peyron citait un enfant qui après quatre ans d’apprentissage ne possédait pas moins de 1,258 francs. Sans doute, c’est une exception, mais beaucoup d’autres, après le même temps, ont de 400 à 600 francs. On compte qu’à leur majorité, ceux des pupilles qui se conduiront bien posséderont, après avoir payé toutes leurs dépenses, un capital de 800 à 3,000 francs.

On a enfin fondé quelques écoles où les enfants les mieux doués sont préparés à devenir des contremaîtres. Il y a à Villepreux une école de jardinage et d’horticulture ; une école d’ébénisterie à Montévrain, une école d’imprimerie est en fondation à Alençon ; une école de fleurs fines pour filles se fonde à Bois-Colombes. Mais cette partie de l’œuvre est surtout rendue difficile par l’exiguïté des ressources dont l’administration dispose, et les écoles déjà fondées sont dues à de généreux donateurs.

Il faut espérer que les deux grands obstacles que rencontre l’œuvre si intéressante des enfants moralement abandonnés ne suffiront pas à arrêter son développement, ou plutôt que nous ne tarderons pas à les voir s’abaisser l’un et l’autre.

Le premier consiste dans la limitation des ressources. L’œuvre des enfants abandonnés appartient au département de la Seine dont le budget, si on le compare à celui de la ville de Paris, est bien maigre : il ne dépense par an que 22 millions, alors que Paris en dépense 370.

C’est à la charité privée à lever cet obstacle ; il semble probable que, dès que cette œuvre nouvelle sera connue et que l’excellence de ses résultats aura pu être appréciée, les dons ne manqueront pas d’affluer dans sa caisse.

L’autre obstacle est celui que la loi elle-même oppose au relèvement des enfants, en consacrant l’autorité de la famille quelle que soit son indignité. Mais un projet de loi est déjà déposé devant les Chambres dans le but de faire disparaître un abus si criant ; espérons qu’elles trouveront le temps de faire œuvre utile à l’enfance moralement abandonnée en votant cette loi le plus tôt possible.