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LA MORALE DANS L’ANCIEN JAPON

se garde de faire trop haut l’éloge de ses enfants. La modestie et le bon goût s’unissent pour le lui défendre. »

Mais c’est principalement dans les rapports de maître à domestique que s’affirment la douceur et la politesse des mœurs japonaises. « Le domestique est l’enfant du maître. Celui-ci doit l’aimer comme il aime son enfant… Il faut bien se garder de traiter les domestiques avec sévérité. Encore moins doit-on les frapper. » Nos pères ont, eux aussi, connu les domestiques qui faisaient partie intégrante de la famille. Le pater familias alors était un grand juge. On voit que dans le Japon du bon vieux temps, le père jouait le même rôle : « Il jugera sans partialité les différends qui s’élèveront entre ses serviteurs. En revanche et logiquement il s’imposait de manger comme eux. « Il ne doit pas se réserver d’aliments choisis et leur faire manger des choses de qualité inférieure. » C’était là l’égalité comme la comprenait l’Extrême-Orient.

Ni dans le fond, ni dans la forme, avons-nous dit, nos auteurs ne font preuve d’une grande originalité. Mais quelquefois ils empruntent aux dictons populaires des images qui ne manquent pas de piquant : « L’homme devient bon ou mauvais selon ses amis. Celui qui s’approche du feu s’échauffe. Celui qui tombe dans la boue se salit. »

Volontiers, sur la foi des touristes, on se représente le Japon comme un mauvais lieu ; toutes les femmes y seraient vénales. Telle n’est certes pas l’impression qui ressort de la lecture de nos petits traités. On ne saurait prendre plus de soin qu’ils ne font pour les détourner de la coquetterie et les conserver modestes : « Qu’elle ne soit pas trop élégante dans sa coiffure et ses vêtements, qu’elle se coiffe elle-même sans requérir l’aide d’une main étrangère. » C’était beaucoup demander ; et peut-être l’auteur exigeait-il beaucoup pour obtenir un peu.

Nos moralistes ne veulent pas que la femme recherche les modes nouvelles, ni qu’elle se farde le visage et les lèvres comme une courtisane. « Elle ne doit pas s’entretenir familièrement avec les jeunes gens, ni faire parade de son esprit auprès des étrangers. » Vis-à-vis des hôtes de son mari, elle doit se montrer polie, sans exagération, et surtout sans manifester ses préférences.

En somme on se préoccupait alors d’élever la femme, non