Page:Revue pédagogique, second semestre, 1891.djvu/378

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être d’être signalé aux lecteurs de la Revue. C’est L’Académie françoise, en laquelle est traité de l’institution des mœurs et de ce qui concerne le bien et heureusement vivre en tous estats et conditions : par les préceptes de la doctrine et les exemples de la vie des anciens sages et hommes illustres, par Pierre de la Primaudaye, escuyer, seigneur dudit lieu et de la Barrée, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roy. Revue et corrigée de nouveau avec indices amples. 1 vol. petit in-8° de 772 pages, imprimé à Genève par Jacques Chouet en 1598. La vie de l’auteur est peu connue. Elle fut vraisemblablement consacrée en grande partie à l’étude et à la recherche des matériaux qui devaient composer l’Académie françoise. Quoi qu’il en soit, son ouvrage obtint un grand succès. Il fut imprimé pour la première fois à Paris, chez Guillaume Chaudière, en 1577, et eut depuis de nombreuses éditions, « tant, dit La Croix du Maine, ce livre a été bien reçu soit pour le titre du livre, et pour le contenu en iceluy recueilli fort laborieusement ». C’est, en effet, un véritable monument d’érudition, et La Primaudaye s’est efforcé de justifier le titre un peu ambitieux qu’il a donné à son ouvrage. L’Académie françoise est une sorte d’encyclopédie morale où se trouvent exposés et appuyés sur l’avis des anciens auteurs les principes qui doivent guider l’homme dans les diverses circonstances de sa vie publique et privée. Quantité de questions sont ainsi traitées, un peu à la manière des Essais, à grand renfort de citations empruntées aux philosophes, aux poètes, aux orateurs de l’antiquité. Les Pères de l’Église et l’Écriture sainte sont mis aussi à contribution, et l’auteur ajoute à ce trésor de sagesse ses conseils personnels. Ce traité de morale pratique est présenté sous la forme d’entretiens entre trois gentilshommes angevins, qui prennent pour la circonstance des noms hébreux, « Aser qui signifie Félicité, Amana qui est à dire Vérité, Aram qui dénote Sublimité », et l’auteur lui-même qui se nommera « Architot, qui est autant à dire que Frère de bonté ». À tour de rôle ils proposent un sujet, et chacun le traite en faisant surtout appel à ses souvenirs classiques. Nous n’entreprendrons pas d’analyser les soixante et onze conversations dont l’ensemble forme l’Académie françoise. Nous essaierons seulement de donner une idée de la manière de l’auteur et de la valeur de son livre en étudiant avec quelques détails le chapitre LI, « De la nourriture et instruction des Enfans ».

C’est Aram qui prend la parole et, dès le début, il insiste sur l’importance de la question qui va être traitée. « Nous devons, ce me semble, mes compagnons, reprendre cette matière, et la poursuivre et traiter plus amplement : afin de stimuler et induire les pères et tous ceux qui ont authorité sur les plus jeunes à estre soigneux et diligens de cultiver ceste semence puérile, qui est la source et racine de toute prospérité publique et particulière… Nos anciens rois cognoissant combien estoit nécessaire cette institution de la jeunesse fondèrent jadis et firent construire tant de beaux colleges que nous voyons ès