Page:Revue pédagogique, second semestre, 1891.djvu/527

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
517
LE VRAI DANS L’ÉDUCATION

plutôt que la mode passagère. La sincérité absolue, voilà le premier moyen en éducation et le plus puissant…

Il arrive souvent à la meilleure, à la plus charmante des mères de pervertir très innocemment son enfant, en lui disant tout en riant : Oh, la petite menteuse ! tu dis un mensonge, mon amour ! » Et ces mots sont entremêlés de rires et de baisers ! On inculque ainsi aux enfants l’habitude de fautes qu’ils ont commises jusque-là inconsciemment ; leurs défauts viennent d’abord par héritage, ensuite par les propos inconsidérés de ceux qui les entourent.

On distinguera aisément la jeune fille en qui on a cultivé la vie de l’âme, celle qui préfère l’être au paraître, qui ne sacrifie jamais le fond à la forme et qui voile de modestie exquise le savoir et les dons de l’intelligence. Tout en préférant la simplicité à l’éclat, cette jeune fille se trouverait au besoin parfaitement à l’aise au milieu des grandeurs ; elle éprouverait un enthousiasme sacré pour les choses nobles et grandes et un profond dédain pour les joies de la vanité.

La décoration extérieure, en fait d’éducation, voilà jusqu’ici le principal souci des mères les plus intelligentes. Elles aident leurs filles à acquérir tout ce qui leur permettra d’égaler leurs compagnes les mieux favorisées par la fortune et de briller un jour autant par l’instruction que par la science du savoir-vivre. Ce côté de l’éducation est parfaitement dirigé, je le répète. Mais il y a une mystérieuse influence de l’âme enfantine qui doit s’exercer à toute heure, depuis la prière matinale faite en commun, jusqu’à l’examen de conscience après une journée de travail ou de plaisir. Nulle autre science que l’amour n’inspire cette éducation si simple ; elle continue inconsciente, comme les battements du cœur, comme une respiration nécessaire. »

Voici un passage où se montrent le vif et patriotique intérêt que prend Mme Quinet à la grande œuvre de rénovation par l’école, et le haut idéal qu’elle propose en particulier à notre éducation féminine :

« Dans son ouvrage la République, Edgar Quinet a tracé un programme d’éducation pour les jeunes filles. Il n’a pas vu ses idées réalisées, mais on peut tout espérer, aujourd’hui qu’une génération de Françaises éclairées, formées par l’esprit laïque, élèvera à son tour des citoyens dignes de la France nouvelle. Nous en sommes encore loin ; pourtant les instruments de la régénération sont préparés ; ils fonctionnent déjà. Les jeunes directrices d’école normale ou de lycée ont une grande et belle tâche devant elles ; les voilà à l’œuvre. L’esprit nouveau greffé sur le vieux fond janséniste ou huguenot devrait inspirer l’éducation de la France moderne, au moins pour les femmes. C’est ainsi seulement qu’elles échapperont à l’influence néfaste qui les ressaisit facilement. La femme française de l’avenir, celle que