Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, III.djvu/514

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
504
revue philosophique

de l’enfant était l’état de sa propre sensation, sensation qui appartenait à son propre organisme sensible : cette sensation, à la vérité, a été produite par une cause extérieure, mais elle s’est continuée dans la suite en vertu des forces sensitives agissant à l’intérieur. La sonnerie de l’horloge a été l’occasion du mouvement de la tête, mais la cause était l’adaptation de l’organisme sensible au mouvement ainsi communiqué. Ou bien supposez que l’on vienne dire que la sonnerie de l’horloge était une partie de la cause, alors j’ajouterais qu’une certaine quantité de cette partie était seulement nécessaire pour produire l’effet en question — l’organisme vivant contenait tout le reste. Quand l’horloge s’est arrêtée, son rôle était achevé ; ce qui a suivi provenait de causes agissant dans l’enfant lui-même. Nous pouvons admettre que l’horloge était la cause du commencement, mais la cause de la continuation, c’est-à-dire de l’habitude, était dans l’ensemble de la constitution propre de l’enfant.

Ces observations ne s’adressent pas exceptionnellement à la philosophie de M. Dumont en général ou à son analyse de l’habitude en particulier ; la citation empruntée à son article a seulement servi à raviver dans mon esprit une ancienne impression et est venue s’offrir comme un texte pour une dissertation sur le danger que court la philosophie, en employant d’une manière vague des termes fondamentaux. La doctrine de l’automatisme, plus ou moins complètement acceptée par un grand nombre de penseurs d’ailleurs très-clairvoyants, me semble être la plus grande pierre d’achoppement sur le chemin d’une philosophie complète et conséquente avec elle-même, et cette doctrine pourrait se croire en possession d’une base solide si l’on accordait sérieusement, ne fût-ce que pour un instant, qu’un effet peut subsister en l’absence de sa cause.

J’aurais été heureux d’avoir l’occasion de discuter toute cette question avec M. Dumont lui-même, par l’intermédiaire de la Revue philosophique, mais la mort a rendu cette discussion impossible en enlevant cet homme brillant, qui donnait de si grandes espérances ; la lucidité de ses vues, la vigueur de son intelligence, et son esprit philosophique semblaient l’appeler à un rang éminent parmi les penseurs des temps modernes.

Alexander Main.
Arbroath (Écosse).