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Paul Tannery.la géométrie imaginaire.

ligne géodésique de l’une une ligne géodésique de l’autre[1]. Chaque figure tracée sur le plan sera donc l’image d’une figure tracée sur l’hémisphère ; les longueurs des côtés et les valeurs des angles des deux figures correspondantes seront liées par une relation analytique telle que de la théorie du plan, cette relation étant donnée, on déduirait celle de la sphère, quand même l’intuition de celle-ci ne serait pas donnée.

Or Beltrami démontre que la surface pseudosphérique type, dont la construction est impossible (ou, si l’on veut, le plan de Lobatchefski), peut être toute entière représentée de même idéalement à l’intérieur d’une surface limitée du plan, d’un cercle concentrique au pôle. Comme tout à l’heure l’équateur de la sphère correspondait aux points à l’infini du plan tangent, la circonférence de ce cercle correspondra aux points à l’infini de la surface pseudosphérique, les points extérieurs ne correspondant à rien pour cette surface. Ainsi deux droites du plan se coupant sur cette circonférence représenteront deux lignes géodésiques parallèles de la surface pseudosphérique ; deux droites se coupant en dehors représenteront deux lignes géodésiques qui ne se coupent pas, etc. On peut donc s’aider de cette représentation pour établir la théorie de la surface pseudosphérique.

Mais ce qu’on représente ainsi, ce n’est plus, comme tout à l’heure sur la sphère, des figures réelles, ce sont des relations analytiques. Ce n’est plus une projection, c’est un symbolisme.

Nous pouvons concevoir facilement des projections analogues représentant par des symboles prêtant à l’intuition, les relations analytiques de la géométrie sphérique ou de la géométrie pseudosphérique. Cela pourrait même se faire de diverses manières ; seulement les figures images, au lieu d’être tracées sur un plan, le seront dans l’espace, soit dans la totalité pour la géométrie sphérique, soit dans l’intérieur d’une sphère pour la pseudosphérique.

On trouvera les éléments d’un tel symbolisme dans les citations suivantes où, je le répète, on pourra ne chercher d’ailleurs qu’un spécimen du langage de la géométrie imaginaire ; elles sont empruntées à Klein[2]. L’idée du procédé est due à Cayley.

« Soit donnée, comme surface fondamentale, une surface du second degré[3] supposée quelconque. Deux points donnés de l’espace déterminent par l’intersection de la droite qui les joint et de la sur-

  1. Les arcs de grand cercle se projetant dans ce système suivant des droites.
  2. Sur la géométrie dite non euclidienne, par Félix Klein. Bulletin des sciences mathématiques et astronomiques, II, 1871, p. 341 et suiv.
  3. Ce sont les surfaces qui, comme la sphère, sont rencontrées par toute droite en deux points et en deux seulement, ces points étant d’ailleurs réels ou imaginaires.