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chimériques. Les esprits succombent sous le poids des faits ; bientôt aucun savant ne sera plus capable d’embrasser l’ensemble d’une science : comment s*élever alors à ces généralités fécondes qui seules peuvent enfanter de nouvelles théories et de nouvelles découvertes ? Le présent est triste, mais à moins d’une répudiation énergique des errements actuels, l’avenir est désespéré et nous retournons à la barbarie. Le morceau est curieux et mérite d’être cité. « De la même manière que le sauvage envisage son fétiche, que le barbare croit en la puissance du soleil, de la lune et des astres, nous continuerons à considérer les principes que nous avons découverts dans les sciences comme la source de toute certitude et de toute évidence. Plus les uns s’attacheront à des forces qui ne sont que des entités imaginaires, plus aussi les effets qu’ils croiront découvrir prendront des proportions incompréhensibles ; plus les autres s’attacheront aux lois et aux rapports de nombre plus tôt en surgiront des formules qui deviendront inintelligibles. À mesure que nous abandonnons la découverte des causes véritables, grandissent les rapports lointains des causes illusoires que nous croyons connaître, par le seul fait des expériences que nous continuons d’en faire. Là où les sciences dans leur progrès s’arrêtent, elles deviennent de la foi et déchoient comme toutes les croyances. La science positive n’est un dogme qu’à la condition que la pensée s’élève sans cesse à des découvertes plus grandes.

« Depuis le baquet de Mesmer, quelle action dissolvante du bon sens les nouvelles forces de l’électricité et du magnétisme n’ont-elles pas déjà exercée ? Journellement, le nombre des somnambules augmente ; de véritables sectes de voyants et de spirites se forment. Si elles tendent encore à disparaître devant les efforts des hommes de la science sérieuse, quel progrès ces hommes eux-mêmes ont-ils fait faire à la connaissance de ces forces ?

« En astronomie, nous ignorons jusqu’à la raison des lois les plus élémentaires qui régissent le mouvement des astres, et déjà nous écrivons des livres fort beaux sur la pluralité des mondes habités. Bientôt nous voudrons y reconnaître nos frères et nos amis. Si nous persévérons dans la même voie, il nous faudra un siècle à peine pour donner naissance à une astrologie nouvelle.

« En chimie les interprétations des amyloïdes nous ouvrent des perspectives étranges sur la possibilité d’une renaissance de l’alchimie. C’est que les notions que nous attachons aux corps simples sont incomplètes et que nous somme incapables, malgré toutes nos expériences, d’en découvrir les raisons.

« Nos cours publics, dans les sciences naturelles, nous ont déjà rappelé les plus tristes jours du Bas-Empire, alors que des professeurs illustres se sont efforcés de démontrer l’existence ou la non-existence de Dieu selon la génération spontanée ou la continuité des espèces. Les germes élémentaires des espèces peuvent être coéternels à la matière, et Dieu peut avoir créé la matière de façon qu’elle ait engendré les êtres