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la causalité à priori ne peut être soutenue, que par celui qui n’en a jamais étudié l’application dans le domaine de l’expérience. La doctrine de Kant exige logiquement la certitude infaillible de tout jugement dans lequel est contenue une catégorie. Schopenhauer allait même jusqu’à soutenir que personne n’a jamais fait une fausse application de la causalité, que personne ne confond la pure succession avec le rapport de cause à effet. Mais, pour partager cette opinion, il faut être aveuglé par l’esprit de système. Celui qui sait de quelle manière se découvrent les lois de la physique, et se détermine leur valeur toujours hypothétique, ne croira jamais que la certitude qu’elles nous donnent soit garantie par une catégorie quelconque. » Kant en montrant la vanité des affirmations à priori du dogmatisme sur Dieu, la liberté et l’immortalité, réalisait une révolution salutaire et considérable en philosophie ; mais, en faisant dépendre l’expérience réelle de la possibilité de l’expérience, il raisonnait comme le dogmatisme, qui donne la possibilité comme principe logique et cause efficiente à la réalité. Il suppose que la pensée peut s’affranchir de l’expérience et prendre son point de départ en dehors de cette dernière. Il ne se distingue pas non plus d’un véritable dogmatique, en ce que la méthode et la théorie servent chez lui à atteindre un but fixé à l’avance par un e marche en apparence rationnelle.

Schaeffle : L’Origine de la société d’après les vues théoriques de la sélection sociologique. — On a, dans l’application des principes de la sélection au développement des sociétés humaines, trop oublié les différences qui séparent le règne humain du règne animal proprement dit, et méconnu la complication et la délicatesse infiniment plus grandes des faits sociaux. L’auteur s’est attaché à combler ces lacunes dans son livre : Constitution et Vie du corps social (Bau und Leben des socialen Körpers}}). Il croit que la sélection bien entendue permet d’expliquer, sans les dénaturer, la formation et les caractères des concepts moraux, et qu’elle ne conduit pas nécessairement à conclure, comme certain darwinien, que l’amour du prochain n’est qu’hypocrisie, mensonge ou sottise. — Les faits sociaux se prêtent, d’ailleurs, plus aisément à l’étude que les cellules ou les astres, dont on a récemment cherché à ramener l’évolution au principe de la concurrence.

Avenarius : La Question de la philosophie scientifique. — C’est une réfutation étendue des objections dirigées par Ulrici dans l’avant-dernier numéro de la Zeitschrift. Le lecteur connaît assez les tendances de la revue* d’Avenarius pour deviner la nature de cette réfutation.

Nous signalerons parmi les analyses :

Fox Bourne : La Vie de Loche, 2 vol. London, King et Cie, 1876. — Paulsen analyse avec soin cette étude, avant tout biographique, et fait ressortir les informations neuves et curieuses qu’elle nous apporte sur le caractère du philosophe anglais, sur ses liaisons sentimentales, sur ses études médicales, sur la part qui revient à son compatriote