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mènes nerveux et cérébraux) et d’opérations mentales déterminées : c’est ce que la psychologie contemporaine appelle un « processus ». L’acte final, lorsqu’il s’agit de perceptions sensibles, arrive seul à la clarté de la conscience : aussi dit-on qu’ « une intuition sensible est, non point l’image ou la copie d’une chose extérieure à la conscience et semblable en essence, mais le signe d’une occasion fournie à la conscience (d’où et comment ? il n’importe) de sentir ou de se représenter intuitivement la chose externe conformément à la nature de notre conscience. » Mais alors, si la chose en soi reste insaisissable, les rapports ou les fonctions que notre esprit institue entre les faits de perception sont purement d’ordre phénoménal comme ceux-ci, c’est-à-dire doivent se déduire de notre manière de penser. C’est le cas des catégories de l’entendement, des principes de causalité, d’espace et de temps, des concepts de force et de matière, de corps et d’âme, généralement de tous les facteurs du savoir humain.

Cette « phénoménalité de la connaissance », selon l’expression kantienne consacrée, ne s’entend d’ordinaire que des choses extérieures : ce qui est une inconséquence. Tout événement psychique en effet, représentations sensibles, sentiments, désirs, etc., peut devenir inconscient sans disparaître, et exercer encore son action sur les états présents à la conscience. La conscience ou l’inconscience ne constitue donc qu’un différence de forme dans la manière « d’être là » des états internes. Ce qu’ils sont en eux-mêmes dans le cas d’inconscience, nous l’ignorons : ce qu’ils sont en se montrant à la conscience n’est qu’une façon d’apparaître au sujet connaissant. Ainsi non-seulement le monde extérieur, mais encore tout le contenu actuel ou prochain de la conscience, y compris l’opposition du conscient et de l’inconscient, tout cela n’est qu’un mode de représentation. La distinction du monde intérieur ne s’impose à nous que sub forma conscientiæ : elle n’existe que par là, et sa valeur est toute d’accident.

Qu’est-ce que cette activité mentale d’où dépend la moindre notion comme la plus raffinée ? Depuis Kant, c’est ce qu’on nomme « une synthèse, c’est-à-dire la résorption d’actes psychiques multiples (représentations, perceptions) en une pensée unique, laquelle à son tour peut devenir l’objet d’une combinaison ultérieure avec d’autres pensées, et par conséquent le point de départ d’une synthèse plus haute. Il n’y a dans les actes psychiques dont la conscience est le théâtre rien d’isolé : nous pouvons bien les ramener à des éléments, dont se composera par exemple un mobile intéressé, une représentation ou un désir ; mais en réalité nous n’atteignons jamais au cours du développement de la conscience un état psychique vraiment élémentaire : la plus simple perception est toujours une résultante complexe de certaines impressions sensitives et de certaines opérations de l’entendement. » Faire attention (aufmerken auf) à une seule perception ou représentation entre toutes celles qui se trouvent dans la conscience, c’est encore se tenir prêt à combiner