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hartmann. — la philosophie religieuse

sister un dieu personnel, mais lui assigne pour ainsi dire une place à la porte, c’est-à-dire l’exclut de toute participation au processus du monde et restreint son activité au seul acte de la création. Comme le dit très bien Pfleiderer, le déisme est le renversement du théisme par le rationalisme ; il précède immédiatement la conversion au matérialisme athée et y conduit toujours en fait. Le théisme, au contraire, admet un dieu personnel, créateur et gouverneur du monde, intervenant continuellement dans le processus du monde, le maintenant et le dirigeant. C’est par abus qu’on appelle théisme un point de vue qui ne reconnaît ni la personnalité ni le gouvernement de Dieu dans le sens indiqué. D’après la terminologie reçue, Pfleiderer n’a donc plus le droit d’appliquer à son système l’appellation de théisme, et de nommer déisme ce que l’on désigne ailleurs sous le nom de théisme (dans le sens restreint du mot), et de déisme ou théisme supra-naturaliste et rationaliste (dans le sens large du mot). Le théisme, en admettant la personnalité de Dieu et son opposition avec le monde, lui enlève son caractère absolu, empêche l’homme de se reconnaître un avec Dieu, abaisse la religion à la pseudo-religion hétéronome (religion de la loi avec ou sans délivrance externe magique) ; le déisme, de son côté, remplace à proprement parler la religion par l’idéal humanitaire (la franc-maçonnerie).

L’assertion d’après laquelle le panthéisme détruit la spiritualité de l’absolu est également insoutenable. Si auparavant on a choisi une expression trop restreinte, ici on en choisit une trop large. Le naturalisme seul porte atteinte à la spiritualité de Dieu, en représentant la nature comme l’unique cause du processus du monde ; mais plus ce concept de la nature s’écarte du sens spiritualiste, plus il cesse de pouvoir être identifié avec le concept de Dieu, et plus il s’éloigne du panthéisme, le sens littéral de ce mot étant que rien autre, si ce n’est Dieu, est tout dans le tout. C’est donc seulement en tant que le naturalisme s’écarte du panthéisme qu’il mérite le reproche adressé par Pfleiderer au panthéisme ; mais ce reproche n’est nullement applicable au panthéisme proprement dit. Celui-ci peut être du monisme abstrait ou concret.

Comme monisme abstrait qui soutient « l’unité et l’universalité de l’être divin d’une manière abstraite, parce qu’il est l’infini simple en soi, le panthéisme devient de l’acomisme, c’est-à-dire l’existence du monde se perd dans l’être un de Dieu, le fini n’est qu’une apparence dénuée de réalité, mais sans qu’on puisse comprendre d’où provient cette apparence. » À cette forme du panthéisme, on peut objecter avec raison qu’elle n’est pas philosophique, « puisque l’unité du Dieu et du monde lui cache la différence dans l’unité » ; mais on ne peut