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thédrale se promettait bien de traiter à son tour avec l’ex-confesseur de Louis XIII, mais il avait alors d’autres soins [1].

Il se trouvait que le diocèse n’avait qu’un chef nominal. Depuis deux ans qu’on l’avait fait archevêque, à vingt-trois ans, Louis de Nogaret, deuxième fils du duc d’Épernon, s’était abstenu de parti pris de venir à Toulouse. Il ne refusait pas de jouir des immenses revenus de son temporel, mais il ne voulait être qu’homme de guerre et se gardait soigneusement de se faire sacrer ; aussi dut-on en faire un prince de l’Église. C’est le fameux cardinal de La Valette, qui ne se démit de son siège qu’en 1628, sans l’avoir occupé jamais. Les chanoines les plus intègres, las de ses atermoiements, avaient proposé qu’on le mît en demeure d’assumer et d’exercer son ministère spirituel[2] ; mais on ne les écoutait guère. Le vicaire général, qui jouissait de toute l’autorité épiscopale, n’était pas naturellement fort enclin à redescendre au second rang. Les jésuites, qui le dirigeaient, l’aidaient à traîner l’affaire en longueur. Heureusement pour lui et pour eux, la plupart des chanoines étaient comme lui à leur dévotion. C’est dans sa maison du cloître Saint-Etienne — il s’était sans doute installé à l’archevêché — que le P. Coton demeura pendant son séjour à Toulouse[3].

Ce vicaire général, qui était docteur en théologie, se nommait Jean de Rudèle. Suivant les décrets du concile de Trente, dont personne, dans le clergé du temps, ne contestait l’autorité, la police religieuse eût dû lui appartenir : on verra plus tard qu’il ne l’exerçait pourtant qu’en sous-ordre. Car, si depuis le fatal concordat de Léon X et de François Ier, l’Église de France avait cessé d’être gallicane, et de fait et de volonté, elle était censée l’être : le pouvoir civil, pour se ressaisir des droits essentiels que ce malheureux chancelier Du Prat avait délaissés, lui prêtait d’autorité toutes les libertés dont lui-même avait besoin. De là vient que les Cours supérieures, qui avaient mission de représenter le roi, s’étaient arrogé certaines attributions de la juridiction des évêques. Le Parlement de Toulouse n’était pas moins jaloux que les autres de maintenir les droits du souverain, en tant que corps toutefois, car individuellement la plupart de ses membres étaient comme pleins de l’esprit de Rome et se portaient avec une incroyable intolérance à la défense de l’orthodoxie. L’inquisiteur ad honores, qui demeurait près du Palais[4] n’avait pas lieu de re-

  1. Archives de la Haute-Garonne. G. Chapitre Saint-Etienne de Toulouse : reg. des délibérations de1618-1619, fol. 12, verso.
  2. Ibidem., fol. 41, recto.
  3. Ibidem, fol. 21, verso.
  4. Dans une rue qu’on appelle encore rue de l’Inquisition.