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c’est la constance des lois naturelles, c’est le déterminisme des phénomènes.

Quel rapport y a-t-il entre cette logique objective et la logique subjective ? Il est aisé de le comprendre. Tout raisonnement, quel qu’il soit, est une suite de phénomènes psychiques qui, en tant que phénomènes, sont soumis aux lois de la logique objective, au déterminisme. Mais, en même temps, ces phénomènes doivent correspondre à une série de phénomènes externes ; s’ils correspondent fidèlement à cette série, ils seront doublement logiques, logiques parce qu’ils sont soumis au déterminisme, logiques encore parce qu’ils sont en corrélation avec une autre série de phénomènes soumis eux aussi à la logique du déterminisme.

Ainsi tous les phénomènes en un certain sens sont conformes à la logique, parce qu’ils sont soumis aux lois du déterminisme, c’est-à-dire qu’un esprit très-puissant qui aurait des prémisses suffisantes pourrait, en raisonnant logiquement, arriver à les prédire et à les connaître à priori d’après leurs antécédents. Les actes et les pensées des fous, à ce point de vue, peuvent passer pour soumis aux lois de la logique. M. Maudsley accorderait bien que si l’on connaissait non-seulement les pensées des fous, mais encore toutes les autres circonstances qui peuvent influer sur leurs déterminations, il serait possible de prédire, de connaître à l’avance les actes qu’ils vont accomplir. Si les actes des fous sont illogiques, c’est que les faits de conscience qui sont logiquement produits dans leur esprit ne correspondent pas à la réalité extérieure présente ou future ; ni les prémisses sur lesquelles ils raisonnent, ni leurs raisonnements, ni leurs conclusions ne s’accordent avec le déterminisme extérieur.

La logique, dans le sens étroit du mot, est l’accord de deux déterminismes au moins ; dans le sens large, c’est le déterminisme universel des phénomènes. On peut dire ainsi qu’il est logique que les fous et bien d’autres personnes pensent et agissent illogiquement. Il suffit d’ailleurs que les actes et les pensées des fous, soient soumis au déterminisme pour qu’ils soient soumis également à la loi de concurrence et de sélection.

Nous sommes donc amenés à conclure à la généralité et à l’universalité probables de la concurrence et de la sélection dans les cas de production d’une erreur. Sans doute cette lutte et cette sélection ne sont pas entièrement semblables à celles qui se manifestent dans les rapports des êtres organisés entre eux. Cependant il y a entre ces différentes manifestations d’une même loi des analogies importantes. Dans le monde étudié par les sciences naturelles, nous avons