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raissent avec plus de facilité et de clarté, lorsqu’ils sont exposés aux yeux comme en un tableau. Ce n’est pas chose aisée que de découvrir les relations de nombre, en les considérant directement comme nombres. Mais si ces nombres sont exprimés par des lignes, l’œil découvre aisément la règle de leurs changements ; il suit la courbe qui court d’une extrémité à l’autre ; il prend note de l’ordre dans lequel se succèdent ses convexités et ses concavités ; de la sorte, les observations isolées sont comparées, généralisées et amenées à une règle. — Cette méthode nous permet d’extraire des lois, non seulement de bonnes observations, mais, en une certaine limite, d’observations imparfaites. « En effet, l’imperfection des observations peut être en partie corrigée par cette considération que, bien qu’elles nous semblent irrégulières, les faits connexes qu’elles représentent imparfaitement sont réellement réguliers. Et la méthode des courbes nous permet de remédier en partie à cette apparente irrégularité. En effet, quand les observations imparfaites ont été exprimées graphiquement par des ordonnées, nous obtenons une courbe non pas régulière et coulante en quelque sorte, comme elle serait si les observations contenaient seulement les résultats rigoureux de lois régulières, mais une courbe rompue et comme tordue capricieusement, marquée d’irrégularités qui dépendent non de la loi, mais du hasard. » Mais alors nous pouvons voir avec certitude que les irrégularités de la courbe sont dues à des erreurs d’observation, et nous pouvons les rejeter une fois pour toutes, en traçant une courbe plus régulière, coupant toutes les petites sinuosités irrégulières, laissant les unes à droite, les autres à gauche. Dans ce cas, nous supposons que les erreurs d’observation se compensent ; et la courbe régulière que nous obtenons ainsi, débarrassée de toutes les erreurs accidentelles d’observation, est l’expression des lois du changement et de la succession.

Il est une autre manière d’éliminer les erreurs et les irrégularités de l’observation, sans recourir aux représentations de la géométrie. En fait, la méthode des courbes, appliquée à des observations irrégulières, est une méthode des moyennes, puisque la ligne que nous considérons comme l’expression exacte de la loi est moyenne entre les irrégularités les plus grandes et les plus petites. Nous pouvons établir ces moyennes par les seuls nombres ; il suffit pour cela de considérer un grand nombre d’observations, et de prendre la moyenne numérique des écarts les plus grands et les plus petits. La vertu de cette méthode, fréquemment employée en astronomie, particulièrement dans les tables des mouvements célestes, résulte de ce principe que, dans les cas où les quantités observées présentent d’autres inégalités que celles dont nous désirons déter-