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à faire qu’à jeter par-dessus bord notre conception actuelle des choses !

Ajoutez, poursuit Wundt, que les prétendues observations spirites, celle de Zöllner comme les autres, n’ont jamais été faites dans des conditions, je ne dis pas scientifiques, mais simplement acceptables. Ainsi la première condition pour que les expériences de Slade réussissent, c’est que tous les assistants tiennent leurs mains sur une table et qu’aucun assistant ne se trouve en dehors du cercle. Une partie considérable du champ d’observation échappe donc aux regards. Les longues jambes de Slade demeuraient presque toujours visibles, disent les adeptes ; presque toujours oui, mais pas toujours. Il en faut dire autant des mains. En général, c’est le médium seul qui décide quand un phénomène doit avoir lieu et s’il doit avoir lieu. Les assistants proposent, le médium dispose. À chaque nouvelle proposition, l’esprit ou les esprits ne manquent point de répondre par écrit sur l’ardoise : « We will try it. » Mais tantôt les esprits font ce qu’on leur demande, tantôt ils ne le font pas, ou font même tout le contraire ! À un moment donné, ce sont des apparitions lumineuses que le médium assure voir au plafond et que les spectateurs cherchent en vain, la tête levée en l’air ; dans un autre instant, c’est le spirite qui tombe dans des convulsions et détourne tout à coup l’attention. Tous ceux qui ont assisté, dans la maison de Zöllner, aux séances de Slade, ont été témoins de ces scènes.

Quant à lui, Wundt, voici ce qu’il a vu. Les personnes présentes, et parmi elles se trouvaient Ludwig et Thiersch, étaient assises, les mains placées l’une à côté de l’autre, autour d’une table à jeu de forme carrée, un assistant de chaque côté. Plusieurs écrits furent produits sur une tablette d’ardoise que Slade tenait, tout entière ou en partie, sous la table. L’inscription plus étendue parut, comme d’ordinaire, sur une double tablette d’ardoise reliée par une charnière ; pendant l’expérience, Slade la tira peu à peu sous le bord de la table, si bien qu’on la vit quelques instants ; mais la main du médium, sur laquelle reposait la tablette, ne fut pas pour cela visible.

La plupart de ces textes étaient rédigés en anglais ; un seul le fut en allemand, mais en un allemand défectueux et tel que l’écrirait un Américain ou un Anglais qui le saurait aussi mal que Slade. Durant toute la séance, la porte de la chambre fut bruyamment secouée comme par de forts coups de vent, quoique toute celte après-midi-là l’air fût parfaitement calme. Slade eut plusieurs attaques convulsives au cours de la séance ; il demanda à Wundt, qui était assis près de lui, s’il ne sentait rien. Les autres assistants dirent éprouver aux jambes des impressions de choc ; Wundt n’a rien senti. À la fin de la séance, Slade plaça ses mains sur celles des assistants et leva manifestement la table de plusieurs centimètres en l’air : il est évident que cette table fut poussée de bas en haut par une force appliquée au centre. Nous demandâmes au médium d’accomplir quelques-unes de ses expériences en présence d’un observateur placé en dehors du cercle. Il refusa, sous prétexte que dans de telles conditions les esprits refuse-