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analyses. — wigand. Der Darwinismus.

Un dernier chapitre, consacré à l’avenir du darwinisme, nous montre la doctrine en voie de décomposition. Un désaccord complet s’est révélé peu à peu entre les adhérents les plus résolus ; on ne compte plus le nombre des sectes dissidentes.

C’est sur cette idée que se termine l’ouvrage de Wigand.

La question de l’origine des espèces, on le voit assez, n’est point de celles qu’on met aux voix ; la popularité serait ici un argument de nulle valeur. Trop de savants sont eux-mêmes sujets à un entraînement irréfléchi. À considérer rigoureusement les principes de la doctrine transformiste, on reconnaît l’inanité des déclamations mises au service du dogme nouveau. La lutte des darwinistes contre leurs adversaires est celle des mécanistes purs contre les dynamistes : cette dernière remonte aux premières spéculations de l’intelligence humaine. Pour nous en tenir au monde moderne, elle est représentée par deux des plus grands noms de la philosophie et de la science : Descartes et Leibniz. La matière est-elle un simple continu étendu, ou un ensemble harmonique d’éléments de force, d’actions dynamiques ? Les physiciens en général sont avec Descartes, les biologistes et les philosophes avec Leibniz.

Une considération capitale semble décider en faveur des premiers. S’il y a une science des phénomènes, c’est à la condition que ceux-ci obéissent aux lois du nombre, de la mesure, et au principe de causalité. Or le mécanisme est là tout entier. Il va de soi que nul ne saurait contester cette manière scientifique et positive d’étudier les faits de la nature : les résultats obtenus l’ont mise au-dessus de toute discussion. L’erreur, et elle est grave, consiste à croire que la recherche des causes mécaniques des phénomènes est inséparable d’une conception mécaniste de l’univers. Beaucoup de savants, par habitude d’intelligence ou par une sorte d’instinct de conservation, repoussent à ce titre toute conception dynamique ou téléologique des faits. Ils oublient que la recherche scientifique n’atteint en définitive que des rapports de temps ou de lieu, ce qui établit sans doute sur des bases indestructibles le mécanisme ou le déterminisme universel des phénomènes ; mais que ces déterminations laissent subsister les différences de propriétés, de forme, de structure, d’organisation, d’évolution des phénomènes ou des êtres. En un mot, le côté idéal des phénomènes que la physique ancienne avait pris à tort pour objet de ses études est inséparable du côté matériel et mécanique. Généralisons : la réduction universelle des phénomènes à la mécanique des atomes, qui est, selon la remarque fort juste de Dubois-Reymond, le but suprême de la science, ne serait encore qu’un mode de conception des phénomènes sous le double rapport fondamental d’espace et de temps, et non une réduction des essences ou une connaissance intégrale des choses.

Bornons-nous à l’ordre particulier des créations organiques.

Tous les phénomènes caractéristiques de la vie, régénération, rédintégration, réparation, e sont de la même nature que les phénomènes de