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analyses. — robert flint. Antitheistic Théories.

matière et force sont des postulats nécessaires pour l’explication du mouvement ; mais, si elles expliquent le mouvement, il est prouvé par là même qu’elles n’expliquent pas l’existence. Ce qui a besoin de l’activité de la force pour être mis en mouvement ne se suffit pas à soi-même, et l’on en doit dire autant de la force qui a besoin de la matière comme point d’application de son énergie. »

Enfin la thèse matérialiste semble exiger l’existence d’une matière qui précède toute forme, quelle qu’elle soit, de l’esprit, qui existe indépendamment de toute pensée. Mais il est permis de se demander si une pareille conception n’est pas contradictoire. Ce que nous connaissons de la matière, ce sont ses propriétés ; or ces propriétés n’existent qu’en relation avec les sens qui les perçoivent. Couleur, saveur, pesanteur, étendue, rien de tout cela n’est intelligible en dehors d’une conscience. La matière en soi, dépouillée de tous les sensibles, la matière purement objective, est un inconnaissable. « La seule matière qui puisse être conçue ou imaginée, fût-ce simplement comme objet possible de connaissance, c’est une matière qui n’est pas seule, mais accompagnée de l’esprit, une matière relative à l’esprit et dépendante de lui. Mais, s’il en est ainsi, comment le matérialiste sera-t-il fondé à soutenir qu’il existe une chose telle que la matière dont il parle ? Si ce qu’il représente comme la totalité, la substance, l’explication suprême de tous les êtres, est pour la pensée une contradiction absolue, quelle autorité a-t-il pour lui attribuer la réalité véritable et de merveilleux pouvoirs ? Si la matière n’est jamais connue et ne peut être connue comme ayant une existence indépendante, comment peut-on arriver à cette conclusion qu’elle a une telle existence ? »

On peut répondre, il est vrai, que par delà les apparences purement subjectives que donne la sensation, la raison conçoit un objet réel et en quelque manière distinct de l’esprit. Par malheur, le matérialiste n’a pas le droit d’en appeler à la raison. Il est et ne peut être que sensualiste. La matière ne saurait pour lui avoir d’autre existence que celle que lui révèle la sensation, ou qu’il imagine en conséquence de ce qu’il sent. Il ne peut sans contradiction prétendre à la connaître telle qu’elle est en soi.

Toute cette discussion du principe matérialiste nous a paru solide, et les arguments que nous venons de résumer ne sont pas de ceux qu’on est habitué à rencontrer partout. Il ne s’ensuit pas que les autres, pour être plus connus, en soient plus mauvais ; et M. Flint montre fort bien, après les maîtres du spiritualisme contemporain, que le matérialisme n’explique suffisamment ni la vie, ni la conscience, ni la moralité. La 5e leçon est consacrée au positivisme et la 6e au sécularisme. Le sécularisme est une sorte de positivisme pratique. Il compte de l’autre côté du détroit de nombreux adhérents, surtout dans la classe ouvrière. Il est légèrement teinté de socialisme, et ses ancêtres sont : Thomas Paine et Richard Carlyle, Bentham et James Mill, Robert Owen et Georges Combe, plutôt encore qu’Auguste Comte. Ses chefs actuels