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l. liard. — méthode et mathématique de descartes.

l’analyse des anciens et l’algèbre des modernes des aptitudes qui tenaient du prodige ; déjà même, il avait conçu le dessein de les réformer[1]. Plus tard, pendant toute sa jeunesse, et dans ses retraites studieuses, et dans ses fréquents voyages, à Paris, en Allemagne, en Hollande, dans la compagnie des savants et dans la vie des camps, il prenait plaisir à résoudre les problèmes les plus difficiles. Sa réputation en ce genre d’exercices devint si grande, le nombre des questions dont ses correspondants lui demandaient la solution s’accrut tellement, qu’à plus d’une reprise il renonça à ce passe-temps stérile pour s’appliquer à de plus fructueuses recherches. Il avait alors dépassé les mathématiques, et il appliquait sa méthode à des sciences plus complexes.

Quelle application en avait-il faite aux mathématiques ? Et quels fruits en avait-il retirés ? Cette question semble facile à résoudre. La méthode est, nous l’avons vu, un extrait généralisé des mathématiques. L’appliquer aux mathématiques, c’était simplement, peut-il paraître, la faire rentrer dans l’enveloppe d’où elle était sortie. Ne retrouve-t-on pas l’esprit et même la lettre de la méthode dans ces lignes où Descartes indique la manière de venir aux équations qui servent à résoudre les problèmes : « Voulant résoudre quelque problème, on doit d’abord le considérer comme déjà fait, et donner des noms à toutes les lignes qui semblent nécessaires pour le construire, aussi bien à celles qui sont inconnues qu’aux autres. Puis, sans considérer aucune différence entre ces lignes connues et inconnues, on doit parcourir la difficulté selon l’ordre qui montre le plus naturellement de tous en quelle sorte elles dépendent mutuellement les unes des autres, jusqu’à ce qu’on ait trouvé moyen d’exprimer une même quantité en deux façons, ce qui se nomme une équation, car les termes de l’une de ces deux façons sont égaux à ceux de l’autre[2]. » Ne croirait-on pas lire, exprimées en langage mathématique, la seconde et la troisième règles de Discours ? Et n’en est-il pas encore ainsi pour ce qui concerne la résolution des équations ? « On doit trouver autant de telles équations qu’on a supposé de lignes qui étaient inconnues, ou bien, s’il ne s’en trouve pas tant, et que nonobstant on n’omette rien de ce qui est désiré en la question, cela témoigne qu’elle n’est pas entièrement déterminée. Et lors on peut prendre à discrétion des lignes connues pour toutes les inconnues auxquelles ne correspond aucune équation. Après cela, s’il en reste encore plusieurs, il faut se servir par ordre de chacune des équations qui

  1. Cf. Baillet, La vie de M. Descartes, liv. I, chap. 6.
  2. Géom., liv. Ier.