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professions sociales que leur assigne leur origine, ont le désavantage dans la lutte avec ceux dont ils prennent les positions ou professions ; ils ne peuvent surmonter ce désavantage que grâce à quelque supériorité au point de vue des occupations sur le terrain desquelles ils engagent la lutte. Nous pouvons donc dire que la permission laissée aux hommes de faire dépendre leur carrière de leurs aptitudes est le principe de changement dans l’organisation sociale.

De même que nous avons vu la succession par hérédité mener indirectement à la stabilité, en conservant les positions de l’autorité entre les mains de ceux à qui leur âge donne le plus d’aversion pour les nouveautés, de même, ici, par contre, nous pouvons voir que la succession par droit de capacité mène indirectement au changement. Positivement et négativement à la fois, la possession du pouvoir par les jeunes, facilite l’innovation. Tant que la force déborde, il y a peu à redouter ces obstacles à l’amélioration et les maux qu’ils suscitent, si formidables aux yeux de ceux dont les forces fléchissent ; en même temps, l’imagination plus active qui marche avec une vitalité plus grande, combinée avec une force moindre de l’habitude, facilite l’admission d’idées nouvelles et l’adoption de méthodes qui n’ont pas encore été mises à l’épreuve. Et, comme les diverses positions sociales se trouvent chacune remplie par ceux qui ont démontré par des épreuves qu’ils sont les plus aptes, il est permis à des gens relativement jeunes d’exercer l’autorité ; il en résulte que la succession de par la capacité favorise le changement dans l’organisation sociale, indirectement aussi bien que directement.

Donc, par opposition, nous voyons que, si l’obtention des fonctions par hérédité mène à la rigidité de la structure, l’obtention des fonctions par la capacité mène à la plasticité de la structure. La succession par cause de descendance favorise la conservation de ce qui existe. La succession par cause d’aptitude favorise la transformation et rend possible un état meilleur.

Nous avons vu que « la complication de structure accompagne l’accroissement de masse » dans les organismes sociaux aussi bien que dans les organismes individuels. Lorsque de petites sociétés se combinent pour former des sociétés composées plus étendues, les appareils gouvernants nécessaires dans les diverses sociétés composantes doivent se subordonner à un appareil gouvernant central : de nouvelles structures sont nécessaires. La récomposition d’une société nécessite une complexité analogue plus avancée dans les arrangements gouvernementaux ; enfin, à chacune des étapes de l’accroissement, tous les autres arrangements doivent devenir plus compliqués. Selon la remarque de M. Duruy, Rome, cessant d’être une ville pour deve-