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espinas. — le sens de la couleur

bariolé sur lequel on les distingue. En général cependant, les poissons des rivières sont plus éclatants que les poissons marins, sans doute parce que leur nourriture est plus variée dans ses couleurs ; peut-être leur beauté est-elle due aux insectes qu’ils saisissent à la surface ?… Les crocodiles et les alligators sont ternes ; mais un très grand nombre de chéloniens sont brillamment parés. Les petits sauriens, qui se nourrissent d’insectes, quelquefois de fruits, les iguanes, les grands et les petits lézards, s’écartent souvent, sous l’empire de la sélection sexuelle dirigée par le régime, des couleurs gris et vert qui servent à la protection. Les espèces pourvues d’appendices rouges ou jaunes vivent sur les arbres ; les autres vivent dans les plaines, sur les rochers ou sur les murs. Même observation au sujet des serpents. Les oiseaux rapaces ont d’ordinaire une livrée sombre, comme les crocodiles, les poissons carnassiers et — parmi les invertébrés — les mouches : les oiseaux de nuit sont les analogues des phalènes et des insectes nocturnes. Les oiseaux-mouches et les perroquets sont les plus remarquables de tous par leurs couleurs ou miroitantes ou tranchées ; ils vivent les uns aux dépens des fleurs, les autres aux dépens des fruits. Les perroquets sont l’objet d’une étude spéciale ; l’un d’eux, qui a des habitudes nocturnes et vit de chasse, le strigops, a un plumage vert terne semé de points noirs. Les pigeons terrestres présentent pour la coloration un frappant contraste avec les pigeons des arbres ; les uns vivent de graines, les autres de fruits. « En raison, dit M. Wallace, de la prédominance des forêts et de l’abondance des fleurs, des fruits et des insectes, les oiseaux des tropiques et particulièrement de l’équateur ont été largement adaptés à ces sortes d’aliments, tandis que les mangeurs de graines, qui abondent dans les climats tempérés, où des herbes couvrent la plus grande partie du sol, sont rares en proportion. » Les tragopans d’Amérique, mangeurs de fruits, ont un plumage plus riche que les trapogans de l’Inde, mangeurs de graines ; dans chaque genre, quand on trouve une exception, comme celle du geai parmi les pies, elle s’explique par la différence des aliments. Les mangeurs de poissons sont comme eux blancs sous le ventre, colorés sur le dos : le martin-pêcheur a tout l’éclat des plus brillantes d’entre ses victimes. Il faut s’arrêter. À la fin de sa longue revue, M. G. Allen reconnaît lui-même quelques cas aberrants qu’il ne sait comment justifier, les canards, les paons, les faisans, les flamants ; mais il demande qu’on envisage les grands groupes qu’il a signalés plutôt qu’un petit nombre de singularités encore inexplicables. — Venant enfin aux mammifères, il constate les mêmes coïncidences générales ; les carnivores, surtout les noc-