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analyses. — th. ribot. La philosophie allemande.

ses tendances, Lotze est avant tout métaphysicien (p. 67) Helmholtz pose un principe à priori comme condition de la théorie empirique (p. 142)… La liste des ouvrages de Fechner comprend la métaphysique (p. 155). » Wundt presque seul paraît faire exception. N’est-ce pas asstz ? Veut-on quelque déclaration plus dogmatique ? « C’est peut-être, dit M. Ribot, une nécessité inhérente à toute psychologie même expérimentale de partir de quelque hypothèse métaphysique (p. 28). » Il faut avouer que, si l’on demande davantage à un philosophe qui n’aime pas la métaphysique, on est bien difficile.

Mais ici se présente une question plus embarrassante, que nous n’avons pas du tout le dessein d’éluder. Avec un peu d’exagération peut-être, lui-même en conviendrait (p. xxviii), M. Ribot tend à confondre la psychologie métaphysique avec la psychologie française, » et il se permet à l’adresse de ses compatriotes quelques expressions très vives (p. 5). Genus irritabile vatum. Beaucoup de philosophes sont poètes sur ce point. Que dire là-dessus ? Nous n’avons pas certes l’autorité nécessaire pour trancher une pareille question. Nous devons chercher à nous couvrir de quelque opinion considérable, et nous citons naturellement celle d’un des maîtres français les plus aimés et les plus respectés. Le lecteur nous permettra de transcrire une page que tout le monde connaît, mais que tout le monde aime à relire :

« Il est inutile de le cacher, l’école spiritualiste a subi depuis dix ou quinze ans un échec des plus graves. Elle n’est plus la maîtresse de l’opinion : de toutes parts des objections, des critiques, des imputations justes ou injustes, mais très accréditées, s’élèvent contre elle ; elle subit enfin une crise redoutable. Après tout, s’il ne s’agissait que d’une école, on pourrait s’en consoler ; nulle école n’est éternelle, ni absolument nécessaire ; mais il y a ici plus qu’une école : il y a une idée, l’idée spiritualiste…

« La philosophie ne doit pas oublier qu’elle est une science, et que le rôle, que le devoir même de la science est le progrès… elle doit donc se développer progressivement et, comme toutes les sciences, ajouter sans cesse de nouvelles lumières à celles qu’elle possède déjà ; elle se perd en s’immobilisant… Ce n’est rien proposer de téméraire que de convier l’école spiritualiste à s’imiter elle-même, à se rappeler ses commencements obscurs et glorieux, où dans le silence de l’École normale elle étudiait avec passion les lois de la perception extérieure, les origines de nos idées, l’autorité de la connaissance humaine, les fondements de la psychologie… Une philosophie s’abandonne elle-même lorsqu’elle oublie ou néglige les recherches théoriques ; elle ne doit s’en prendre qu’à soi si elle se voit supplanter par d’autres écoles plus entreprenantes. Ce sont là des vérités qu’il faut se dire à soi-même si l’on ne veut pas se les faire dire par d’autres d’une manière plus désagréable qu’on ne le désirerait. » (Janet, La crise philosophique.)

M. Ribot n’a rien dit d’aussi fort. Mais pourquoi n’a-t-il pas terminé lui aussi par ces paroles : « Ce sont là des vérités qu’il faut se dire à