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INTRODUCTION À LA SCIENCE PHILOSOPHIQUE


II

De quelques définitions récentes de la philosophie[1]

Pendant de longs siècles, la philosophie a été considérée comme une science semblable à toutes les autres, ayant son objet propre, sa méthode, ses résultats acquis. De nos jours, ce caractère de science lui a été refusé. On n’a pas voulu cependant pour cela se priver complètement de philosophie. On a essayé de la conserver à différents titres, sous différents points de vue ; et on en a donné plusieurs définitions nouvelles, que nous voudrions examiner.

La première de ces définitions, qui retranchent le fond de la philosophie, tout en lui laissant le droit à l’existence, est celle-ci : la philosophie est la science de l’inconnu. Nous y avons déjà fait allusion dans notre premier travail ; nous devons ici l’examiner en elle-même.

D’après cette conception, toutes les choses de l’Univers se diviseraient en deux classes : les choses connues et les choses inconnues. Les premières seules sont l’objet de la science ; les secondes sont l’objet de la philosophie. Encore faut-il ici établir une distinction : parmi les choses inconnues, il en est qui sont du même ordre que les choses connues ; ce ne sont pas de pures inconnues ; ce sont des lacunes parmi les connues ; elles tombent ou peuvent tomber sous les prises des mêmes méthodes, et se classer à leur tour dans la catégorie du connu. Ainsi, dans l’étude des fonctions physiologiques, il y a des parties obscures, des points inexplorés ; mais c’est toujours le même domaine ; ainsi en est-il des combinaisons nouvelles que l’on peut trouver en chimie, des astres que l’on peut découvrir dans le ciel, etc. Toute cette portion de l’inconnu n’en est pas moins du domaine de la science, parce que c’est le même genre de recherches que celui où l’on a trouvé jusqu’ici les choses connues.

Ce qui resterait donc à titre d’inconnu pour constituer l’objet

  1. Voir le numéro d’avril 1888.