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A. BINET.sur les mouvements volontaires

durée de la contraction volontaire est de faire prendre au sujet une position fatigante, avec ses deux bras, et de rechercher combien de temps il peut conserver cette attitude. L’expérience fut faite pour la première fois, croyons-nous, par Lasègue, qui constata que, dans l’anesthésie hystérique, la malade garde indéfiniment la position qu’on lui donne, et l’expérimentateur se fatigue d’attendre avant que le sujet soit fatigué de l’immobilité. Lasègue attribuait ce phénomène à l’absence de sensation de fatigue[1].

M. Charcot a présenté dans ses leçons cliniques une hystérique chez laquelle on trouve à l’état de veille l’immobilité cataleptique des membres placés dans les attitudes les plus variées. Nous adhérons pleinement à l’opinion de M. Charcot, qui donne à ce phénomène de la conservation de la pose le caractère d’un phénomène cataleptique. Il s’agit là, croyons-nous, d’un épisode détaché du grand hypnotisme[2].

Nous avons, en 1887, étudié ce phénomène avec M. Féré, sur cinq hystériques, et nous avons essayé d’en fixer les conditions physiologiques.

À peu près en même temps que nous, M. Pitres, dans sa brochure sur l’anesthésic hystérique, reprenait la même question, et aboutissait aux mêmes résultats. Enfin, l’année dernière, MM. Seglas et Chaslin ont publié une étude sur la catatonie, où ils signalent ce phénomène musculaire chez des hystériques, des épileptiques et d’autres malades encore[3].

Nous n’avons pas l’intention de reprendre la question dans son entier ; nous nous attacherons simplement à quelques points nouveaux. La façon la plus simple de faire l’expérience est de prier les malades d’étendre les bras en croix et de les maintenir dans cette position aussi longtemps qu’ils le pourront ; on ne leur permet pas de relever le bras, à mesure qu’il commence à baisser ; tout leur effort doit consister à conserver la position acquise.

Le plus souvent le membre sensible retombe beaucoup plus tôt que le membre anesthésique ; il tombe au bout de 3 à 5 minutes en général, tandis que le membre anesthésique est capable de conserver l’attitude pendant beaucoup plus longtemps, parfois pendant plus d’une heure.

Du reste, on peut dire que les conditions où les deux bras sont placés ne sont pas comparables, car la chute du bras sensible a lieu sous l’influence de la fatigue, et du côté anesthésique le sujet

  1. Catalepsies partielles et passagères, in Études médicales, t.  I. p. 899.
  2. Leçons sur les maladies du système nerveux, t.  III. p. 357.
  3. La Catatonie. (Arch. de Neurologie, n° 44, 45 et 46, 1888.)