Page:Ribot - La vie inconsciente et les mouvements, 1914.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cette tendance au moindre effort, désignée par Max Müller sous le nom de loi de l’altération phonétique, a été étudiée pour les linguistes avec un copieux appareil d’exemples que nous ne pouvons relater ici. Ainsi les lettres latines en passant dans le français tendent à s’affaiblir ; le c rude des Romains devient ç, le p devient v, adripare se change en arriver, putrere en pourrir, etc.[1].

Plus que tout autre, Whitney a insisté sur ce point. « La grande tendance cachée sous un nombre infini de faits en apparence hétérogènes, est la disposition à se défaire de toutes les parties des mots qui peuvent être élaguées sans nuire au sens et à disposer les parties restantes de la façon la plus commode. La linguistique ne saurait mettre en lumière une loi plus fondamentale que celle-ci et d’une aussi grande importance. C’est là le grand courant qui parcourt le langage universel et en remue tous les éléments dans une direction donnée. Il n’y a aucun mal à cela, à moins qu’on ne perde plus qu’on ne gagne par ces tentatives d’économie.

  1. Baudry, Grammaire comparée, pp. 85-86, Brachet, Dictionnaire étymologique, Introduction.