Page:Ribot - La vie inconsciente et les mouvements, 1914.djvu/170

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est à la fois un effet et une cause de la civilisation dont la lutte contre la tendance au moindre effort a été l’un des principaux facteurs[1].

D’abord, dans les sociétés primitives, l’homme impose aux femmes les travaux qui lui répugnent ; il dépense ailleurs son activité : à la chasse et à la guerre qui satisfont ses tendances agressives, violentes — très distinctes de la tendance au travail. Plus tard, c’est l’esclave qui pendant des milliers d’années et chez presque tous les peuples, supporte, par délégation des maîtres, le maximum d’effort. Les procédés coercitifs, le fouet, les ergastules, les tortures infligées, sont une preuve éloquente de cette aversion pour le travail. Tout le monde essayait d’y échapper : les maîtres par leur puissance, les esclaves par leurs révoltes. Enfin, dans notre siècle de travail libre, à la coercition brutale s’est substituée celle des conditions sociales et de la nécessité du labeur quotidien pour vivre. Mais les ateliers et les usines ne sont pas des lieux attrayants et les réclamations incessantes pour

  1. J’entends par civilisation une augmentation en complexité et en coordination, sans souci des avantages et mésavantages qui en résultent. C’est donc une simple constatation de fait, indéniable même pour ceux qui la critiquent.