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ANALYSESernest krause. — Erasmus Darwin.

dans le ciel. J’appliquerai cette ingénieuse idée à la génération ou production de l’embryon, nouvel être qui participe tant à la forme et aux tendances de son père. » Et il continue ainsi : « À cause de l’imperfection du langage, l’enfant est appelé un nouvel être, mais il est en réalité une branche ou un prolongement de l’animal, puisqu’une partie de l’embryon est ou était une partie de son père. On ne peut, à proprement parler, le dire entièrement nouveau à l’époque de sa production, et il peut, par conséquent, retenir quelques-unes des manières d’être de l’organisme qui l’a produit, » Si Darwin ne parle que d’un parent, c’est que, pour lui, l’embryon est formé seulement du spermatozoïde. Aussi parle-t-il toujours d’un « filament » comme du germe de toutes les créatures vivantes. Quant aux ressemblances de la mère et de l’enfant, elles s’expliquaient par l’influence des matériaux nutritifs fournis par la mère. Remarquons d’ailleurs que Darwin soutient avec la plus grande pénétration la théorie de l’épigenèse.

C’est encore dans la Zoonomia que E. Darwin donne un court essai de la théorie de l’évolution, où les principes de cette doctrine sont complètement exposés, quinze ans avant l’apparition de la philosophie zoologique de Lamarck. « II est curieux, a dit Charles Darwin, de voir combien mon grand-père a anticipé les idées vraies et les vues erronées de Lamarck. » En effet, les deux systèmes ont beaucoup de rapport, comme on a pu déjà commencer à s’en apercevoir.

Erasme Durwin indique les principales raisons qui, d’après lui, doivent faire admettre la théorie de l’évolution, ou qui contribuent à la rendre moins invraisemblable : Ces raisons sont : 1o Les grands changements que nous voyons se produire dans les animaux pendant leur vie, par exemple chez la chenille qui devient papillon, chez le lézard qui se transforme en grenouille. — 2o Les grands changements produits artificiellement ou accidentellement chez divers animaux, comme les chevaux, les chiens, les pigeons, etc., par les climats, les saisons, l’exercice fréquent d’un sens ou de certains muscles. — 3o Les grands changements produits chez les animaux avant leur naissance. Ces animaux reproduisent les altérations diverses de la constitution des parents. De plus, des changements sont produits par le croisement d’espèces diverses et aussi probablement par un excès de la nourriture fournie au fœtus. Quelques-unes de ces monstruosités ainsi produites peuvent se transmettre de nouveau et former une nouvelle variété, sinon une nouvelle espèce. — 4o La grande ressemblance de structure qui existe chez tous les animaux à sang chaud, l’homme compris, et qui porte à conclure que tous ces animaux dérivent d’un filament vivant semblable. Chez les uns, ce filament, en avançant vers sa maturité, a acquis des mains et des doigts, reliés par une membrane, etc. — 5o Du commencement à la fin de leur vie, les animaux se transforment continuellement, et cette transformation est due en partie aux efforts, aux mouvements que produisent leurs désirs ou leurs craintes, leurs plaisirs ou leurs peines, les excitations qu’ils reçoivent, etc. Beaucoup de formes ou de tendances aussi acquises