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verse est encore plus vrai : L’homme fait des efforts tant qu’il se trompe ; les erreurs mêmes l’excitent au travail. Avec le développement de l’esprit humain surgissent de nouveaux besoins, de nouvelles manières de penser ; les vieilles doctrines reparaissent sous de nouvelles formes. La science doit tenir compte de ces progrès et se mettre en harmonie avec eux. Celui qui reconnaît cette loi de l’éternel mouvement verra, non dans l’erreur même, mais dans l’immobilité, le mal le plus funeste, et pour lui la méthode la plus vraie sera celle qui, comprenant le mieux le développement du passé, possédant le plus possible la conscience entière du présent dans tous les sens, contiendra ainsi le germe et la matière des développements à venir. »

Quelle serait donc la conclusion de M. Rosenthal ? Pour lui, la méthode scientifique et la méthode philosophique sont l’une et l’autre exclusives, et il en faudrait trouver une qui permit de concilier ce qui paraît trop souvent jusqu’alors contradictoire : la pensée et la volonté d’une part, les phénomènes du monde expérimental de l’autre. Savants et philosophes semblent ennemis, alors qu’ils suivent simplement deux directions, non opposées, non parallèles non plus, mais convergentes à longue distance. Ils doivent travailler ensemble, profiter mutuellement de leurs découvertes, et surtout s’appliquer à laisser toute liberté au développement futur de la pensée humaine. Un jour viendra peut-être où un puissant esprit, découvrant le point où ces deux directions doivent se rencontrer, le fera clairement connaître et par là fera cesser la distinction tout artificielle de la philosophie et de la science. À celui-là, l’avenir appartient. En attendant, le devoir est de renier toute méthode exclusive et de favoriser au plus haut degré la liberté des recherches.

Nous avions raison de dire qu’il n’y a pas d’idées bien neuves dans l’œuvre de M. Rosenthal ; mais on y trouve, en revanche, une grande élévation, beaucoup de forme, même de l’enthousiasme, autant de qualités que ce compte-rendu ne pouvait mettre en relief, mais qui ne manqueront pas de séduire les lecteurs. Peut-être lui reprocheront-ils de s’être un peu trop renfermé dans les limites de l’Allemagne et d’ignorer, ou de paraître, ce qui se fait au delà.

A. Penjon.

Dr Alfons Bilharz. — Der heliocentrische Standpunct der Weltbetrachtung ; Grundlegungen zu einer wirklichen Naturphilosophie (Le point de vue héliocentrique pour considérer le monde : bases d’une véritable philosophie de la nature). Stuttgart, J.-G. Cotta, 1879 (in-16, xvi-326 pages, 14 figures gravées).

Nous avons déjà, dans le numéro de juillet 1880, p. 125, rendu compte d’un ouvrage où M. Bilharz a résumé les principes philosophiques développés dans le livre dont on vient lire l’intitulé. La courte analyse que nous avons donnée de ce résumé n’a peut-être pas besoin d’être refaite, mais il convient au moins d’y ajouter quelques remarques.