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mathématique, on logique, pour peu qu’elle soit complexe relève de cette science de l’ordre en général que nous avons nommée syntactique. Mais nous n’avons encore indiqué que la partie la moins importante de cette science ; il est temps d’arriver un nouveau développement d’idées qui doit avoir l’influence la plus profonde sur la philosophie tout entière.

L’ordre n’est pas autre chose que l’unité dans la multiplicité. Concevoir l’ordre, c’est donc concevoir comment des objets multiples forment dans leur ensemble ou dans leur distribution une unité véritable. Cela n’est possible évidemment que si l’on parvient à déterminer, à exprimer avec une complètes exactitude les rapports que les objets, choses ou phénomènes conservent entre eux. L’expression du rapport ou de la loi qui unit entre elles deux quantités est ce que les mathématiciens nomment une fonction. La théorie des fonctions est donc une des parties principales de la science de l’ordre. Ainsi dans un cercle la longueur de la circonférence et celle du rayon sont deux quantités qui ont entre elles un certain rapport dépendant de la : nature de la courbe exprimée par sa définition. On dira que la circonférence est une fonction du rayon, et la formule

exprimera cette fonction. M. Cournot a consacré à la théorie des fonctions un ouvrage considérable. C’est dans cet ouvrage que sont exposés de la façon la plus complète les principes et les développements de sa philosophie mathématique. Nous ne pouvons entrer ici dans des détails qui seraient infinis ; nous devons nous borner à résumer en quelques mots tout ce qui précède :

Les mathématiques sont la science de l’ordre et de la mesure ;

La science de l’ordre donne naissance à deux théories principales : la théorie des combinaisons, qui contient comme développements particuliers l’arithmétique, l’algèbre, la logique ; la théorie des fonctions, qui en donnant, quand cela est possible, une expression mathématique des rapports des choses, permet-de faire rentrer dans un ordre précis les objets et les phénomènes les plus variés.

Nous ne sommes pas encore arrivés à la philosophie proprement dite. Quand on étudie la philosophie d’un mathématicien, il ne faut jamais manquer de rechercher quelle est parmi toutes les sciences mathématiques celle qui l’a fait, pour ainsi dire, passer des mathématiques pures à la philosophie. Il s’est trouvé que pour M. Cournot cette science de transition a été le calcul des probabilités. C’est peut-être à cette circonstance que notre auteur a dû ses vues les plus fécondes et les plus originales. Ces vues se rangent sous deux