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c’est-à-dire de leur courbure ou de leur occlusion[1] ; la nature, d’autre part, qui n’a ni prévoyance ni puissance, qui n’est rien, ne pouvant rien pour la guérison, il en avait conclu que le médecin, qui ne doit compter que sur lui-même, n’a jamais que deux choses à faire : agir sur les molécules, si le mal vient des molécules ; sur les pores, si le mal vient des pores. Méthode très simple, comme on le voit, et qui devait naturellement conduire à une thérapeutique non moins simple[2].

Mais, dans cette méthode si simple, il y avait cependant encore une certaine complexité. Asclépiade distinguait, dans les maladies, le flux des molécules, lesquelles peuvent être trop grandes ; où mal conformées, ou trop nombreuses, ou trop rapides, et les conduits par où elles cheminent, lesquels peuvent être infléchis ou bouchés ; il distinguait également, dans les maladies, outre ce qu’elles ont de commun, certains traits particuliers, dont il tenait compte dans le traitement[3]. L’originalité de Themison est d’avoir effacé ces distinctions. Sans se préoccuper de la grandeur, de la figure, du nombre, de la rapidité des molécules en circulation, il ramène tout à l’état des pores, dans lesquels on ne peut noter que deux modifications anormales : un trop grand resserrement, ou un trop grand relâchement. Sont-ils trop resserrés, les molécules ne circulent plus, ou avec trop de difficulté et de lenteur ; sont-ils trop relâchés, les molécules circulent trop vite ou s’échappent en trop grande abondance. D’où trois espèces de maladies seulement : les maladies par resserrement, les maladies par relâchement, les maladies mixtes, les pores d’une partie pouvant être dans le même instant trop resserrés, et ceux d’une autre partie trop relâchés. Quant aux caractères individuels des maladies, Themison les négligeait aussi, ne retenant d’autres différences que celles des maladies aiguës et des maladies chroniques, lesquelles rentrent toutefois dans la classification précédente, les maladies aiguës se rapportant au genre resserré, et les chroniques au genre relâché[4].

Il arrivait ainsi à la théorie des affections communes, où communautés (κοινότητες), qui est proprement la méthode du méthodisme, Comme avait dû le faire Asclépiade, mais sans doute avec plus d’insistance, il prenait position entre le dogmatisme et l’empirisme, ou

  1. « Aut viarum flexu, conclusione atque squammularum exputo (id., ibid.), » passage évidemment altéré, mais dont le sens général n’est pas douteux.
  2. Il la réduisait au régime et au mouvement sous toutes les formes (id., ibid.).
  3. Voir Raynaud, ch.  5.
  4. Celse, De re medica, præf., sub fine.