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problème moral une fois mis de côté, le Kantisme s’allégerait facilement du noumène. Mais, ce retranchement même opéré, pourrait-on dire que la philosophie de Kant soit une philosophie vraiment moniste ? Pas encore peut-être, et cependant il demeure incontestable que cette philosophie tend au monisme. Elle y tend dans la pensée de Kant, mais bien plus encore en elle-même et dans son fond dernier, puisque c’est le monisme qu’en ont tiré sans exception tous Îles penseurs qui, depuis Kant, l’ont prise pour base de leurs spéculations en métaphysique.

Que l’idéalisme tel que nous le comprenons soit une doctrine relativement récente, puisqu’elle ne remonte guère qu’à Leibniz, cela n’est pas contestable ; aussi n’est-ce nullement l’antiquité de cet idéalisme que nous avons pensé établir. Ce que nous avons voulu montrer, c’est que les partisans du réalisme posant en face de l’esprit cette chose sans nom qui ne peut pas être, quoi qu’ils en disent, la monade leibnizienne, cette chose différente de l’esprit et qui constituerait un second être, un second absolu, se mettent en opposition flagrante avec la pensée de tous les grands maîtres de tous les temps. Ce que nous avons soutenu, c’est que leur doctrine est inacceptable, parce qu’elle implique la dualité de l’être, et, sur ce point, c’est à Platon, à Aristote, aux Stoïciens, à Plotin, à Spinoza, à Leibniz, à Kant, que nous renvoyons ces prétendus défenseurs de la tradition philosophique.

Dunan.