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moi-même un grand nombre dont quelques-unes sont citées dans le cours de ce travail.

Voici ce qu’écrit sur ce sujet le Dr Bernheim. « Beaucoup de sujets qui ont été hypnotisés antérieurement peuvent, sans être hypnotisés de nouveau, pour peu qu’ils aient été dressés par un petit nombre d’hypnotisations antérieures (une, deux ou trois suffisent chez quelques-uns) présenter à l’état de veille l’aptitude à manifester les mêmes phénomènes suggestifs (p. 57) », et il mentionne les contractures, les mouvements automatiques, des modifications de la sensibilité, des hallucinations, etc. Il n’est même pas besoin, dit-il plus loin, que le sujet arrive à un sommeil profond, et il est des individus chez lesquels les suggestions faites à l’état de veille réussissent, tandis que celles qui sont faites pendant le sommeil sont inefficaces.

Les mêmes observations ont été faites par M. Liégeois (De la suggestion hypnotique, etc.). Cet observateur a bien vu que l’état des personnes sur lesquelles on peut produire ainsi des suggestions à l’état de veille a quelque chose de particulier ; je transcris le passage correspondant de sa brochure à cause de son importance : « Ce qui est surtout très singulier, dans les expériences dont je viens de parler et qui pourraient, on le conçoit, être multipliées à l’infini, ce qu’il serait très intéressant d’étudier à fond et de bien caractériser, c’est l’état du sujet mis en expérience. Il ne présente pas la moindre apparence de sommeil ; il a les yeux ouverts, les mouvements aisés, il parle, marche, agit comme tout le monde, il prend part à la conversation, répond aux objections, les discute, a souvent des réparties heureuses ; il semble être dans un état absolument normal, excepté sur le seul point où porte la prohibition de l’expérimentateur (p. 60). » Et plus loin, il continue : « Je ne sache pas qu’on ait donné encore aucun nom à cet état vraiment bizarre. Le mot de somnambulisme ne lui convient pas, ce me semble, car ici il n’y a pas de sommeil ; ne pourrait-on l’appeler condition prime par analogie avec le cas de Félida X… que le Dr Azam, de Bordeaux, a appelé condition seconde ? »

Ch. Richet a observé aussi un état analogue sur quelques-uns de ses sujets ; mais il donne trop peu de détails pour qu’on puisse en tirer des conclusions précises. Dans un article : Sur la personnalité et la mémoire dans le somnambulisme, publié dans la Revue philosophique, 1883, nº 3, il s’exprime ainsi :

« Chez ces deux femmes, il n’y a pas, entre l’état de sommeil magnétique et l’état normal cette différence nette et formelle qu’on voit dans les livres classiques. Chez elles on peut provoquer pres-