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On remarquera que les mouvements passifs provoquent exactement la même excitation motrice que nous venons de signaler à la suite des mouvements actifs ; l’excitation paraît même quelquefois plus intense. Sur des sujets sains les mouvements passifs de flexion des doigts peuvent augmenter l’énergie de la pression de plus d’un quart. Ce résultat acquiert une importance considérable si on le rapproche du fait suivant :

L’histoire des épidémies spasmodiques nous montre que chez les névropathes plus sensibles d’une manière générale à tous les agents dynamogènes et inhibitoires, la seule vue d’un mouvement rhythmique provoque l’exécution de ce mouvement. Ce phénomène d’induction psycho-motrice peut se montrer à l’état sporadique, comme M. Ch. Richet en a signalé un exemple. Si, prenant un sujet de ce genre, nous les prions de regarder avec attention les mouvements de flexion que nous faisons avec notre main ; au bout de quelques minutes, il déclare qu’il a

[Image à insérer]

Fig. 2. — Représentation graphique du phénomène de l’induction psychomotrice. (Le tracé se lit de gauche à droite.)

la sensation que le même mouvement se fait dans sa propre main, bien qu’elle soit complètement immobile ; et au bout de quelques instants en effet sa main commence à exécuter irrésistiblement des mouvements rhythmiques de flexion. Or, si au lieu de laisser l’expérience en arriver à ce point, on l’arrête au moment où le sujet commence à avoir la sensation du mouvement qui ne se fait pas encore, au moment où le mouvement est à l’état naissant, en lui plaçant un dynamomètre dans la main, on constate que l’énergie de la pression a augmenté d’un tiers ou de la moitié.

La figure 2 montre des contractions qui deviennent plus énergiques en allant de gauche à droite, c’est-à-dire à mesure que la représentation mentale du mouvement devient plus intense. On remarquera en outre que la contraction est modifiée dans sa forme ; c’est un fait sur lequel nous aurons à revenir.

Ces faits nous paraissent propres à montrer que l’énergie d’un mouvement est en rapport avec l’intensité de la représentation mentale de ce même mouvement. Cette déduction est en rapport avec l’idée admise par les psychologues, que l’idée du mouvement c’est déjà le mouvement qui commence. Elle a pour corollaire que toutes les fois que l’idée est suffisamment intense, l’action la suit nécessairement. C’est là une notion bien importante pour l’intelligence des impulsions irrésistibles, où l’acte devient la conséquence inévitable de la persistance de