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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


I. — Pédagogie.

J. Payot. L’éducation de la volonté. Paris, Alcan ; 1894, in-8, xii-276p.

La question que M. P. s’est proposé de traiter en ce livre est celle peut-être qui aujourd’hui s’impose le plus impérieusement aux pédagogues et aux éducateurs. Enseigner aux enfants et aux jeunes gens à vouloir, les rendre capables d’assujettir à leurs idées leurs tendances instinctives et irréfléchies, d’assurer à leur intelligence une souveraine maîtrise sur tous leurs actes, faire qu’ils soient les auteurs conscients de leur destinée et non point les jouets inertes des circonstances où le hasard les a jetés, c’est là l’indispensable sans doute de l’éducation, mais cet indispensable, c’est en même temps le plus difficile. Il y a à cela plusieurs raisons, mais la meilleure, c’est que, tandis que la psychologie de l’intelligence est, dans ses cadres généraux du moins, plus qu’à demi constituée, nous sommes fort mal éclairés encore sur les lois qui président à la production des actes volontaires et à la formation du caractère. L’étude des actes volontaires se ramène encore chez la plupart des psychologues à l’étude des états intellectuels, sensations, images ou idées, qui sont les antécédents de ces actes, et des émotions qui accompagnent et modifient ces états intellectuels ou bien encore à l’analyse du mécanisme physiologique, très souvent hypothétique, qui permet à une image de déterminer telle ou telle série de contractions musculaires. Mais il n’est pas douteux pour ceux qui se sont consacrés spécialement à l’étude des phénomènes moteurs et en particulier de l’activité réfléchie, que cette double série d’analyses n’épuise point la psychologie des actes et que les représentations, même colorées et renforcées par les sentiments qu’elles provoquent, ne sont pas les seuls antécédents des mouvements volontaires, ni les conditions toujours suffisantes de leur apparition : c’est là un fait que met nettement en lumière l’étude des maladies mentales, celle surtout des impulsions et des phénomènes d’arrêt qui se rencontrent chez les dégénérés. Notre esprit est autre chose qu’un vaste réseau de représentations distinctes, teintées de joie ou de tristesse par les réactions