Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/137

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déjà absorbé tout le revenu net du royaume ; c’est à la rigueur que l’on met dans l’exécution de ces lois, que nous sommes redevables de ce qu’elles ne sont pas encore devenues oppressives outre mesure. Si la loi assurait à tout indigent les moyens de s’entretenir, et si les secours étaient suffisants pour qu’il pût vivre assez agréablement, l’on serait conduit, par la théorie, à affirmer que tous les autres impôts ensemble pourraient paraître légers, comparés avec le seul impôt des pauvres. Les lois de la gravitation ne sont pas plus certaines que ne l’est la tendance qu’auraient de pareilles lois à changer la richesse et la puissance en misère et en faiblesse, en faisant renoncer l’homme à tout travail qui n’aurait pas pour unique but celui de se procurer des subsistances. Il n’y aurait plus de distinctions relevant des facultés intellectuelles ; l’esprit ne serait occupé que du soin de satisfaire les besoins du corps, jusqu’à ce qu’à la fin toutes les classes fussent en proie à une indigence universelle. Il est heureux que ces lois aient été en vigueur à une époque de prospérité toujours croissante, pendant laquelle les fonds pour le paiement du travail ont régulièrement augmenté, et ont sollicité un accroissement de population. Mais si nos progrès devenaient plus lents, si nous nous trouvions dans un état stationnaire — dont j’espère que nous sommes encore bien éloignés, — c’est alors que la nature pernicieuse de ces lois deviendrait plus manifeste, plus alarmante ; et c’est alors aussi que leur abolition rencontrerait bien plus d’obstacles et de difficultés.