Page:Ricci - Trigault -Histoire de l'expédition chrestienne au royaume de la Chine, Rache, 1617.djvu/51

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bastir ou reparer. Et ce qui semble plus incroiable, il arrivera quelques anneez, que ceste si grande somme d’impostz n’esgale pas la despense, mais l’on est necessité de faire nouvelles impositions.

Mais venons particulierement aux ordres des Magistratz, desquelz en general on trouve de deux sortes. L’un est de ceux qui non seulement ont des offices de Cour dans la maison du Roy, mais qui encor d’icelle, comme d’une eschauguette, gouvernent tout le Royaume. L’autre est des Magistratz des Provinces, qui gouvernent chasque Province ou ville. Il y a cinq ou six volumes d’assez juste grosseur traitans de l’un, & de l’autre ordre, qui s’exposent en vente par tout le Royaume, & s’impriment en la Cour Royale de Pequin deux fois tous les mois. Ce qui est tres-facile à leur manière d’imprimer. En ces volumes on ne lit autre chose que les noms, païs & degrez de ceux qui pour lors en tout le Royaume tiennent Magistrature. Or il est du tout necessaire qu’ilz se r’impriment si souvent : d’autant que parmi si grand nombre de ces Mandarins, il arrivé tous les jours du changement. Car les uns meurent, les autres sont privez de leurs offices, les autres abaissez à des moindres charges ; en fin, les parens des uns passent de cete vie à l’autre, duquel dernier accident se fait, que pour porter trois ans le dueil, il faut qu’ilz reviennent necessairement à la maison, renonçans aussi-tost à toute Magistrature quelle qu’elle soit, dequoy nous parlerons cy dessouz en son lieu. Et pour remplir les places de ceux qui defaillent, il y en a tousjours en la cour de Pequin qui attendent ces evenemens fortuitz. Entre si grande multitude de Magistratz, je parleray seulement de ceux-là, que je jugeray necessaires pour l’intelligence des livres suivans, & me tairay de tout le Sénat des gens de guerre ; afin que je ne passe les bornes de la briefveté que je me suis proposée.

Je parleray premierement des Offices de Cour, apres des Provinciaux. Il y a donc six Sieges principaux de Juges de Cour. Ilz appellent le premier Li pu, car pu en langue Chinoise est le mesme que Siege, ou Presidial. Li pu, Siege de Magistrat. Celuy-cy est eslevé sur tous les autres Presidiaux, pource qu’il luy appartient de nommer entierement tous les Magistratz de tout l’ordre Philosophal, qu’on estime les principaux du Royaume. La dénomination desquelz est arrestee selon le jugement de ce Presidial par la meilleure & plus excellente escriture. Et commençant tous, jusqu’à un, aux moindres offices, ilz montent peu à peu par les degrez d’honneur ordonnez par les loix, pourveu qu’ez inferieurs ilz aient donné tesmoignage de leur vertu & equité. S’ilz sont au contraire, ilz sont abaissez, à des moindres charges, ou privez des leurs. Car c’est chose certaine