Page:Ricci - Trigault -Histoire de l'expédition chrestienne au royaume de la Chine, Rache, 1617.djvu/62

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quatriesme sont contez les volages, & trop legers à prononcer leurs sentences, & ceux ausquelz en l’administration des charges publiques, la raison & conseil ont defailli ; ceux là sont destinez à des moindres offices, ou sont renvoyez ez lieux, l’on juge le gouvernement de la Republique estre plus facile. Au dernier rang sont mis ceux qui ne se gouvernent pas assez prudemment, ou les leurs, & toute leur famille, & meinent une vie indigne d’un Magistrat : ceux-cy sont privez pour tousjours de leurs offices, & immunitez. La mesme enqueste se fait aussi des Magistratz de Cour, mais seulement tous les cinq ans. Ce qui est aussi practiqué avec les chefs de guerre en mesme temp, avec mesme ordre, & mesme rigueur.

Aucun en tout le Royaume n’a charge de Magistrat en la Province en laquelle il est né, si ce n’est un gouvernement militaire. Cela se fait, de peur que les premiers qui administrent la justice, se laissent gagner aux parens, ou aux amis. Mais les derniers, à fin qu’incitez par l’amour de la patrie, ilz la defendent plus courageusement. Tant que le maistre, quel qu’il soit, est en devoir de Magistrat, aucun des enfans ou serviteurs domestiques ne sort de la maison, craignant qu’il ne brigue des presens. Mais des serviteurs publiquement ordonnez au Magistrat, leur rendent dehors toute sorte de service. Mais quand il est sorty de la maison, il scelle avec son cachet les portes, soit privées, soit publiques, ou on administre le droict de crainte que quelqu'un des domestiques n’en sorte sans son sceu.

Ilz ne laissent aussi vivre dans l’enclos du Royaume aucun estranger qui fait dessein de s’en retourner en son pays, ou qu’on entend avoir quelque commerce avec ceux de dehors. Voire aussi ilz ne permettent à aucun estranger entrer au coeur du Royaume ; & encor que je n’aye veu aucune loy qui le defende, toutefois je voi que cete coustume est depuis plusieurs siecles observée entre eux, par certaine crainte & horreur qu’ilz ont des peuples estrangers. Et cela se doit entendre non seulement des estrangers qu’une longue espace de terre & de mers a rendu incognus aux Chinois ; mais aussi de leurs amis, & tributaires de leur Empire ; telz que sont les voisins de Coria & qui usent quasi de mesmes loix que les Chinois. Je n’en ay encor jusques à present veu aucun de semblable ; excepté quelques esclaves ; que je ne sçai quel capitaine avoit amené de là avec soy, apres avoir residé plusieura anneez en ce Royaume. Mais si quelque estranger entre secretement au Royaume de la Chine, ilz ne le punissent ny de servitude ny de mort : mais ilz lui defendent de retourner en son pays, de peur que d’aventure il ne trame des nouveautez parmi les siens, à la ruine de l’Empire Chinois. C’et pourquoy ilz punissent fort severement