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du Chev. Grandisson

Dimanche au soir.

Fort bien : mais moi, qui prends la plume d’Henriette, je parie que ses larmes se sécheront bientôt. Le Marquis & la Marquise sont beaucoup mieux. Le Comte est arrivé. Les Seigneurs Jules & Sebaste sont avec lui. N’avez-vous pas vu le Comte, Lucie, pendant le séjour que vous avez fait à Londres ? Une figure aimable, en vérité, si l’air grave y dominoit un peu moins. Mais cette gravité même ne lui nuira point auprès de son Héroïne. N’est-il pas venu, dans les termes du Poëte[1], « pour dire un éternel adieu » ? Ne pas l’honorer d’un regard, ce seroit un mépris, qui ne peut jamais trouver place dans la belle ame de Clémentine.

Aussi ne s’est-elle pas fait presser pour descendre à son arrivée. Pour moi, j’espere beaucoup de l’avenir. On ne remarque plus rien qui se ressente de l’ancien désordre. Elle aime à rêver ; elle se promene souvent seule au jardin. Eh bien ? Qui sait de quoi elle s’occupe ? C’est peut-être un fort bon effet de sa guérison ; je ne crois pas facilement aux miracles ; mais il me semble que ce n’en seroit pas un. Sir Charles est marié. Clémentine n’a pas vingt ans. Le Comte est aimable. J’ai vu des révolutions plus étonnantes, dont je n’ai fait honneur qu’à la nature. Elle m’a semblé un peu grave, lors-

  1. Lée, dans sa Tragédie de Théodose.