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Page:Richepin - Les Blasphèmes, 1890.djvu/163

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LA MORT DES DIEUX

Comme une femme en mal d’enfant
Qui d’un peuple entier serait pleine.
 
Versant du sang, versant du feu,
Le soleil de ses deux yeux louches
Contemplait ces énormes couches.
Et ce Soleil-là, c’était Dieu.


*



Et voici qu’un grand vol de hurlements farouches
Sortit des milliard de millions de bouches,
Et dans un cri de mort unique se mêla.
Toutes les nations, tous les temps, étaient là.
Tyrans, sujets, guerriers, mages, prêtres, apôtres,
Aucun ne comprenait ce que disaient les autres ;
Mais tous ils regardaient le ciel, et chacun d’eux
Croyant que pour lui seul luisait l’astre hideux,
Tyrans, sujets, guerriers, mages, prêtres, apôtres,
Chacun d’eux avait soif du sang de tous les autres.
Le Soleil flamboyant était épanoui.
Et comme on lui criait : « Faut-il ? » Il leur dit : « Oui. »