Page:Rimbaud - Œuvres, Mercure de France.djvu/283

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à Montfaulcon, plus becquetés d’oiseaux que dés à coudre, dans la bruine et le soleil !

Oh ! Sire, ce n’est pas pour folle plaisance qu’est là Villon ! Pauvres housseurs ont assez de peine ! Clergeons attendant leur nomination de l’Université, musards, montreurs de synges, joueurs de rebec qui payent leur escot en chansons, chevaucheurs d’escuryes, sires de deux écus, reîtres cachant leur nez en pots d’étain mieux qu’en casques de guerre[1] ; tous ces pauvres enfants secs et noirs comme escouvillons, qui ne voient de pain qu’aux fenêtres, que l’hiver emmitoufle d’onglée, ont choisi maistre François pour mère nourricière ! Or nécessité fait gens méprendre, et faim saillir le loup du bois : peut-être l’Escollier, ung jour de famine, a-t-il pris des tripes au baquet des bouchers, pour les fricasser à l’Abreuvoir Popin ou à la taverne du Pestel ? Peut-être a-t-il pipé une douzaine de pains au boulanger, ou changé à la Pomme du Pin un broc d’eau claire pour un broc de vin de Baigneux ? Peut-être, un soir de grande galle au Plat-d’Étain, a-t-il rossé le guet à son arrivée ; ou les a-t-on surpris, autour de Montfaulcon, dans un souper conquis par noise, avec une dixaine de ribaudes ? Ce sont les méfaits de maistre François ! Parce qu’il nous montre ung gras chanoine mignonnant avec sa dame en chambre bien nattée, parce qu’il dit que le chappelain n’a cure de confesser, sinon chambrières et dames, et qu’il conseille aux dévotes, par bonne mocque, parler contemplation sous les courtines, l’escollier fol, si bien riant, si bien chantant, gent comme esmerillon, tremble sous les griffes des grands juges, ces terribles oiseaux noirs que suivent corbeaux et pies ! Lui et ses

  1. Olivier Basselin, Vaux-de-Vire.