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18 RELIQUES

frère, vers ce frère dont sa mère était fière d’un orgueil qui ne se pouvait céler quoi qu’il en eût, ce frère qui ramassait en se jouant les palmes des concours généraux, comme il enlevait avec dédain les prix annuels du collège. A côté de ce frère — public, si l’on peut dire, — combien n’aimait-elle pas davantage le frère plus intime vivant à ses côtés, ce frère au visage obstiné, aux yeux tour à tour autoritaires ou caressants, ce frère qui parfois condescendait à jouer avec ses petites sœurs, qui avait réponse, quand il voulait, à toutes les questions, qui pour des heures se plongeait, insensible à tout, la pensée partie bien loin de Charleville, dans la lecture de quelque bouquin, ce frère, parfois nerveux et taquin jusqu’à la brutalité, parfois câlin comme une femme.

Tout ce qui concernait Arthur, la petite fille le serrait en son cœur et les années d’enfance témoignaient déjà de cet envoûtement dont, sa vie durant, elle resterait l’objet — si toutefois ce mot maléfique se peut employer lorsqu’il s’agit du génie et de son emprise sur une âme aussi pieuse et aussi haute que celle d’Isabelle Rimbaud.

D’autant plus allait-elle souffrir des conflits