Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/186

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Jusque-là, dit un de ses adversaires les moins suspects[1], le Ministre de la Police avait paru de bonne foi. » Tout va changer. C’en est fini de la mansuétude. Intéressé à convaincre les chouans d’un crime où beaucoup sont disposés à voir la main des républicains, Fouché laissera poursuivre ceux qu’il a promis d’oublier. S’ils n’ont pas personnellement participé à l’attentat de la rue Nicaise, ils ont eu vent du complot, ils ont été des affidés, les rapports de ses agents en font foi. Trois d’entre eux s’étaient rangés sous sa bannière, on gardera pour eux des ménagements. Les autres ont dédaigné ses offres ; la promesse qui le liait vis-à-vis d’eux ne le lie plus ; à eux de veiller à ne pas se laisser prendre.

Les époux Lacroix furent les premières victimes de ce revirement. Le nouveau Directeur du Jury, Roussereau[2], les avait réclamés : propriétaires du Portail et de La Beaupinaie, ils avaient vu tous les brigands ; ils connaissaient tous les coupables ; d’eux on pouvait espérer les indications que la Justice avait le devoir de chercher et qu’il était urgent d’obtenir, « la punition des grands crimes perdant une partie de son effet, lorsqu’elle ne suit pas de près le délit ». Fouché étant resté sourd à la requête, Roussereau la réitéra le 4 nivôse. Arrivée à Paris en une heure de trouble et de confusion, elle ne reçut pas de réponse. Enfin, le 16, sur appel au Ministre de la Justice, Abrial, et par son intervention, ordre était donné d’expédier à Tours les deux prévenus réclamés.

Ils furent mis en route dès le lendemain. Le

  1. A. de Beauchamp. Mémoires inédits.
  2. Voir page 168.