Aller au contenu

Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Fouché, qui avait vu dans l’incident une occasion de porter un coup à la coterie de ses adversaires[1] et de ruiner le crédit de Savary, qui menaçait le sien. Et l’on rappelait les notes publiées, à son instigation, par les journaux ; les éloges faits de son zèle, de sa pénétration, de son habileté[2] ; l’on rappelait son intervention menant tout, du premier au dernier jour. Qui, « par un seul mot aux chefs de la chouannerie, s’était fait rendre le captif[3] ! » Qui, sinon lui, avait réglé, sans doute inspiré, les réponses et jusqu’au silence des prévenus ? Qui avait autorisé, poussé peut-être Clément de Ris à ne pas comparaître à l’audience ? Abstention fatale aux condamnés, mais qui demeurait à la charge de celui-ci, car elle prêtait à supposer quelque intrigue, mettant, dans le passé, le Ministre à la discrétion du Sénateur, et, dans le présent, le Sénateur à la merci du Ministre.

Lancée sur cette piste, l’imagination allait son train. L’hypothèse naissait, prenait corps, que les agents du rapt avaient bien pu, comme ceux de la délivrance, être des instruments au service des intérêts du Ministre. Pourquoi celui qui avait sauvé la victime, sauvé partie des coupables, n’aurait-il pas conçu la pensée et préparé le plan de l’attentat ? Dans quel but ? Rééditant, mais, cette fois, à titre de faits précis, de vagues rumeurs répandues naguère, les adversaires de Fouché le donnaient à entendre.


IV

  1. Entre autres Lucien Bonaparte ; son frère Joseph ; Fontanes ; Portalis ; Chaptal ; Talleyrand.
  2. Journal des Débats. ─ 22 vendémiaire, an IX.
  3. Mémoires de Desmarets.