en quoy prinssions plaisir, elles ne nous doivent destourber de
nostre Propos selon nature (1). » Il y a plus, lorsque Politien
a recours aux Commentaires de Simplicius, pour parer, comme
il le dit, aux défectuosités de son manuscrit, non seulement Du
Moulin le suit, mais il emprunte encore davantage. C’est ainsi
qu’au chapitre XXXIII, il nous ajoute tout un développement
pris dans Simplicius « Tout ainsi que l’on ne met point de
blanc là où il ne fault pas attaindre, ainsi en est-il de la nature
du Mal, lequel se faict en ce monde, car il n’est point proposé
pour estre attainct, mais plus tost pour estre evité comme si le
Bien estoit mis pour le blanc, et le Mal fust tout cela ou le blanc
n’est point. Pour ne toucher au blanc, on ne designe point de
lieu certain aussi pour ne faire le Bien ou (bien) pour faire le
Mal, il’n’y a nulle reige ni precepte. etc. (2). » Pourquoi Du
Moulin a-t-il reproduit un-développement si long et pourtant si
différent du reste du Manuel ? Ce n’est certes point la valeur philosophique de ce passage qui a pu le séduire, mais bien plutôt
la métaphore, l’image. Il y avait là comme l’expression concrète
de cette formule abstraite du stoïcisme, que le mal n’est que
l’absence du bien. Du Moulin y trouvait donc l’application d’un
procédé cher à tous les moralistes du XVIe siècle, qui avaient de
cette manière travaillé à la diffusion du stoïcisme ; il le saisit
comme il se présente. Il réalise ainsi son programme comprendre
le Manuel et le faire comprendre, et rendre vivante et
pratique une doctrine assez abstraite ; dès lors, tout ce qui apporte
de la vie, du pittoresque, lui semble de bonne mise. Inutile donc
pour nous de rechercher les inexactitudes (3), les contre-sens (4)
(1) Cf. Du Moulin, ouvrage cité, chap. XI, p. 11.
(2) Ibid., chap. XXXIII, pp. 27, 28.
(3) Ibid., ouvrage cité, chap. XI, p. 10 : « si le Marinier sort à l’eaue fresche » pour traduire : « si exeas aquatum », de Politien… ; ou encore XXVIII, p. 21 : « comme si c’estoit le reng ou Dieu t’eust ordonné et mis pour combatre. » Politien avait traduit « tanquam sis a Deo in hac acie collocatus. »
Ou encore XXXI, p. 25 : « ce seroit follie à toy de te marrir qu’elles ne te seroient advenues. » ; et Politien : « ne ægre fer, quia tibi non acciderunt… »
(4) Quelquefois le contre-sens est évident, car il suit Politien : Chap. XXX, p. 24 : « Et puis, le Cordouannier ne le fournist-il pas de souliers et l’Armurier de