Page:Robert de Paradès - Mémoires secrets.djvu/21

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passer, avertit le corps de Garde ; le sergent sortit avec deux fusilliers, & vint droit à moi. Il fallut payer de hardiesse : je descendis le rempart du côté où il venoit, comme si ma promenade eût été finie. Nous nous rencontrâmes au bas de la rampe ; il me demanda ce que je venois de faire dans la Place ; que je devois savoir qu’il étoit défendu d’y entrer : je répondis qu’étant étranger, j’ignorois la défense, mais que l’homme qui me conduisit auroit dû m’en instruire, puisqu’étant de la Ville, il devoit connoître la consigne. Qu’on arrête ce coquin, dit le sergent, & qu’on le conduife au corps-de-garde. Les soldats saisirent mon conducteur au collet, & l’emmenèrent. Je tirai sur le champ dix guinées de ma poche, je les présentai au sergent, en lui disant : laissez aller ce pauvre diable ; il a sans doute péché sans le savoir. Il prit mon argent ; & se tournant vers les soldats, il leur dit : chassez-le hors de la Place, & qu’il n’y entre plus. S’adressant ensuite à moi d’un ton radouci, Milord, me dit-il, désireroit peut-être voir la forteresse : je me fais un devoir de le conduire ; je vais déposer mon fusil au corps-de-garde, & je reviens dans le moment. N’ayant pas grande confiance dans sa parole, je me débarrassai de mes papiers, & les plaçai dans un canon que j’avois