Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/211

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actes du ministère, le parti féminin entend distinguer entre ces actes et couvrir seulement de ses éloges ceux qui, bravant d’antiques et vermoulus préjugés, ont eu pour conséquence de lever l’interdit séculaire jeté politiquement sur la femme ! Le ministère a reconnu enfin, comme tous les penseurs indépendants, l’aptitude de la femme aux plus hautes fonctions publiques. La femme est aujourd’hui électrice et éligible ; mais jusqu’ici elle avait dû borner son ambition à servir son pays dans les plus infimes emplois, l’admission aux grades supérieurs lui avait été refusée sans motif par tous les gouvernements qui se sont succédé depuis le grand jour de son émancipation. Le ministère — je ne veux pas considérer pour quels motifs et lui marchander ma gratitude — a fait officiellement cesser cette injustice. En nommant une femme préfète de Sarthe-et-Cher, deux autres femmes préfètes de l’Oise et des Bouches-du-Rhône, en nommant douze sous-préfètes et une certaine quantité de mairesses, le ministère a donné des gages à la cause de la liberté et de l’égalité. Les accusations que l’on a entassées contre la préfète de Sarthe-et-Cher ne reposent sur rien de sérieux. Les préfets masculins auraient-ils seuls le droit de se nourrir, les préfets masculins prétendraient-ils, pour se délasser du fardeau des affaires, se réserver le droit de valser ? Ces reproches sont ridicules et la Chambre en fera bonne justice…

— Bravo, ma fille ! » cria, une voix dans les tribunes quand Louise Muche (de la Seine) regagna sa place.

Hélène leva la tête et vit que les tribunes de la Chambre étaient occupées par plusieurs rangées de dames qui suivaient les débats en travaillant à quelques petits ouvrages de tricot.

« Ce sont les mamans, dit une élève à Hélène ; les élèves hommes viennent tout seuls ; mais nous sommes accompagnées par nos mères.

— Et ces messieurs dans la grande loge ?

— Ce sont des élèves du Conservatoire aussi, c’est la classe de journalisme ; ils suivent les séances et rédigent des comptes rendus. »